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Ni noir, ni blanc : humain. Un texte de Frantz Fanon

Pour honorer Aimé Césaire et prolonger son concept de « négritude », cet extrait de Peau Noire, Masques blancs, ouvrage d’un autre auteur martiniquais considérable, Frantz Fanon.

1ali_et_fanon-1.1208959887.jpg« Le Noir veut être comme le Blanc. Pour le Noir, il n’y a qu’un destin. Et il est blanc. Il y a de cela longtemps le Noir a admis la supériorité indiscutable du Blanc, et tous ses efforts tendent à réaliser une existence blanche.

N’ai-je donc pas sur cette terre autre chose à faire qu’à venger les noirs du XVIIe siècle?

Dois-je sur cette terre me poser le problème de la vérité noire?

Dois-je me confiner dans la justification d’un angle facial?

Je n’ai pas le droit, moi homme de couleur, de rechercher en quoi ma race est supérieure ou inférieure à une autre race

Je n’ai pas le droit , moi homme de couleur, de souhaiter la cristallisation chez le blanc d’une culpabilité envers le passé de ma race.

Je n’ai pas le droit , moi homme de couleur, de me préoccuper des moyens qui me permettraient de piétiner la fierté de l’ancien maître.

Je n’ai ni le droit ni le devoir d’exiger réparation pour mes ancêtres domestiqués.

Il n’y a pas de mission nègre; il n’y a pas de fardeau blanc.

Je me découvre un jour dans un monde où les choses font mal; un monde où l’on réclame que je me batte; un monde où il est toujours question d’anéantissement ou de victoire.

Je me découvre, moi homme, dans un monde où les mots se frangent de silence; dans un monde où l’autre, interminablement, se durcit.
Non, je n’ai pas le droit de venir et de crier ma haine au Blanc. Je n’ai pas le devoir de murmurer ma reconnaissance.
Il y a ma vie prise au lasso de l’existence. il y a ma liberté qui me renvoie à moi-même. Non, je n’ai pas le droit d’être un Noir.

Je n’ai pas le droit d’être ceci ou cela…

Si le Blanc conteste mon humanité, je lui montrerai, en faisant peser sur sa vie tout mon poids d’homme, que je ne suis pas ce “y a bon banania” qu’il persiste à imaginer.

Je me découvre un jour dans le monde un seul droit: celui d’exiger de l’autre un comportement humain.
Un seul devoir. Celui de ne pas renier ma liberté au travers de mes choix.
(…) Je ne suis pas l’esclave de l’Esclavage qui déshumanisa mes pères. »

>>> Peau Noire, Masques blancs, Édition du Seuil, pp. 185/186 (1952)
>>> La photo : Casbah d’Alger, 1er février 2006. Je demande à Ali de tourner son sac du bon côté. Il ne sait pas qui est Frantz Fanon, qu’il promène ainsi en photo à bout de bras. Des adultes, sans doute, lui parleront de l’auteur des Damnés de la Terre, chantre des indépendances, mort à 36 ans, juste avant les accords d’Évian qui, le 19 mars 1962, mettaient fin à la guerre d’Algérie. © Gérard Ponthieu

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2 réflexions sur “Ni noir, ni blanc : humain. Un texte de Frantz Fanon

  • Le pédagoguebelbrouksy@yahoo.fr

    Le pédagogue :

    « Ô humains ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle et avons fait de vous des peuples et des tribus afin que vous vous entreconnaissiez. Le plus noble d’entre vous auprès d’Allaah est le plus pieux ».
    Les croyants et les croyantes (almouminoune wa almouminaate) font de leur mieux pour mieux saisir le Sens et renforcer le Lien.
    Mais d’innombrables personnes, partout, rejettent le Vrai et s’attachent au faux.
    Concernant les humains, elles épiloguent, encore et encore sur « les races qui composent l’humanité », se lancent dans des théories erronées, se perdent dans des discours absurdes, répandent des sornettes, prennent des vessies pour des lanternes, alimentent et entretiennent le blâmable.
    Les bavardages stériles, les divagations hystériques, les discours mensongers, les commentaires désobligeants, les déclarations arrogantes, les campagnes de dénigrement, les insultes continues, les vexations répétées, les sous-entendus outrageants, les élaborations humiliantes, les propagandes malfaisantes, les tromperies constantes, les combinaisons funestes, les amalgames cruels, les menaces ouvertes, les attaques brutales, les entreprises de démolition et autres ne peuvent en rien, modifier ce que Allaah a décidé.
    « Et dis : ʺLe vrai est venu et le faux a disparu. Le faux est destiné à disparaîtreʺ ».

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    • Va pour la libre expression ! Encore que parler de “liberté” ne soit pas convenable pour ce genre de propos automatique, téléguidé, télécommandé – autant d’atteintes à la libre pensée. Ceux qui, comme ici en l’occurence, prêchent au nom du “vrai” et du “faux”, dont ils sont les censeurs, ne méritent que la considération de curiosité – ce qui est déjà trop.

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