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Florence Aubenas. L’image qui dit la souffrance et l’urgence

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«Oh! putain le cauchemar hier quand la photo de Florence Aubenas est apparue sur l'écran, comme si cette photo m'était adressée ! Car cette Florence était devenue une image, un portrait, un peu comme le Che que tout le monde connaît. Et voila que cette image a bougé ! Florence Aubenas n'est pas une image, elle souffre!»

André, tu viens par tes mots de te placer entre deux réactions reçues après ma note d’hier sur Florence et son apparition virtuelle.

L’une dit : « Merci de nous faire penser à Florence. On espère que les négociations seront efficaces, et pas trop longues. Rien à ajouter. »

L’autre : « Une question : fallait-il justement donner la photo ? Les curieux l'auraient trouvée par google après tout. En l'occurrence, bah, je trouve ça quelque peu dommage... »

Hier donc, après avoir rédigé ma note, je l’ai d’abord publiée sans la photo. Je trouvais plutôt juste la position des télés se refusant à diffuser la vidéo – ne pas se prêter au jeu des ravisseurs. Alors, déjà hier, pourquoi ajouter une photo ici ?
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Et puis je me suis dit, moi aussi, comme ci-dessus: ce qu’exprime Florence est plus important que jamais, au delà du sens de ses mots, forcément sous contrainte ; ce qu’elle tente de nous dire passe, terriblement, par l’image de sa souffrance et de sa détresse. J’ai donc trouvé que son visage virtuel constituait un poignant manifeste pour sa liberté et, par delà, pour la Liberté, ce droit humain fondamental, bafoué par la lâcheté, la démence et, précisément, l’in-humanité. Son regard vaut condamnation et plaide tout fort aussi pour Hussein – si absent pour le coup –, Giuliana (Sgrena), Guy-André (Kieffer) et Frédéric (Nérac) – pour s’en tenir à nos plus proches disparus.

Florence et Hussein, eux, voilà presque deux mois qu’ils sont portés manquants. Leurs images démultipliées en avaient fait des sortes d’icônes, avec ce danger terrible, que pointe si bien André, de s’en accommoder dans cette fonction quasi religieuse : recueillement ET résignation. Oui, bon sang, elle soufre le martyre : elle n’est décidément plus la Florence de ses affiches, souriante, confiante en la vie.

A Marseille le 11 février, lors de la soirée de solidarité organisée par le Club de la presse, j’avais voulu m’associer aussi à la détermination confiante témoignée par le père de Florence. Comme lui, comme Dominique Simonnot, de Libération, je pariais sur cette belle énergie de Florence, celle que je lui connais de ses deux années passées au Centre de formation des journalistes, elle étudiante, moi chargé de l’enseignement ; je pariais plus précisément sur sa capacité de contact, liée à sa soif de connaître, de comprendre ; je voulais croire alors qu’elle aurait bien su les apprivoiser, ses geôliers, voire les embobiner, ou tout au moins faire jouer entre elle et eux cette parole, d’où peuvent naître raison et sagesse…

Mais cette image nouvelle me fait aujourd’hui douter. Comme on peut, face à l’injustifiable, douter du genre humain.

Voilà pourquoi je crois que cette image nouvelle de Florence doit être vue. Parce que, oui, « il faut aller vite ! », comme le clame si fort Jacqueline, sa mère.

––> Images : Giuliana et Florence en photo d'après les vidéos des ravisseurs.
––> L'affiche des quatre Français disparus, éditée par le Comité de soutien et le Club de la presse de Lyon.

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Une réflexion sur “Florence Aubenas. L’image qui dit la souffrance et l’urgence

  • Incompréhensible qu’on puisse écrire des choses pareilles. L’Occident est deve­nu depuis quelques décen­nies un endroit où on peut cre­ver en pleine rue sans obte­nir la moindre aide. Se faire agres­ser, dépouiller, vio­ler devant 53 témoins sans qu’au­cun ne daigne affron­ter sa peur plu­tôt que le déshon­neur et on lit ça : pour­quoi être soli­daire ? Tout sim­ple­ment parce qu’on est encore quelques mil­lions et peut-être plus en France à être res­tés un tant soit peu humains. Contrairement aux lâches qui prennent des otages pour en tirer de l’argent au nom de soit-disant reven­di­ca­tions quelles qu’elles soient. On ne devrait pas s’en arrê­ter là. On devrait leur faire payer cher à ces salauds parce que le résul­tat quand on ne punit pas le crime, c’est qu’il se repro­duit. La preuve c’est le nombre d’o­tages qui ont été faits après sa libé­ra­tion. Ce qui encou­rage le crime c’est avant tout son impu­ni­té et ce qui est à la source de l’im­pu­ni­té même au regard de la jus­tice de nos pays, c’est ce manque fla­grant de soli­da­ri­té avec les victimes.

    Comparez les peines ridi­cules infli­gées à des conduc­teurs sans per­mis ayant tué au volant, à des tra­fi­cants de drogue, aux per­vers qui res­sortent par­fois au bout de quelques années pas­sées non en pri­son mais en éta­blis­se­ment psy­chia­trique et qui au tarif où ils ont payé recom­mencent, à tous les auteurs d’in­ci­vi­li­tés dont les familles occupent les bancs des tri­bu­naux avec des menaces qui n’ont pas besoin d’être ver­bales à l’en­contre des jurés. Face à cela vous avez des citoyens en per­ma­nence dres­sés les uns contre les autres par­fois au sein d’une même famille où per­sonne ne com­mande ou tout le monde fait ce qu’il veut dans son inté­rêt propre avant celui du groupe et ne par­lons même pas de la col­lec­ti­vi­té ! Pourquoi vou­driez-vous qu’on hésite face à des gens à ce point déca­dents puisque c’est comme cela que nous sommes per­çus de l’ex­té­rieur et non sans rai­sons mal­gré notre argent, nos tech­no­lo­gies, nos armes modernes, notre ensei­gne­ment en pleine décon­fi­ture et notre jeu­nesse sans avenir ?

    Alors oui, lire des choses pareilles, cela ne me sur­prend plus certes mais ça conti­nue à me révol­ter comme au pre­mier jour et je ne fais pas de ciné­ma, il n’y a pas de camé­ras ni d’é­chéance élec­to­rale à proximité.

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