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Entre voile et burqa. Guillon et Porte éjectés de France Inter

Et voilà le travail : à peine parti une douzaine de jours et vlan ! on retrouve un pays la tête dans le cul : un ministre et sa madame barbotant dans la ratatouille du fric – ce qui est assez banal en ces temps de petits arrangements particuliers, voyez Boutin, Estrosi, Amara, etc. (sans remonter à Gaymard ni à Sarkozy et leurs magouilles immobilières à Neuilly) – ; une équipe de foot en débandade mondiale ; la garden-party du 14-juillet supprimée. Et en plus une radio publique en manque d’humour et surtout d’humoristes.

Autant de petits faits diversifs (le mot vient de sortir, pas la chose) qui, en effet, font bien diversion. Chacun à son niveau, ils recouvrent d’un voile, ou plutôt d’une gaze quasi laiteuse le spectacle d’une certaine décadence. Ils la laissent entrevoir sans qu’elle se montre totalement ; à peine la révèlent-ils qu’aussitôt ils la masquent. C’est plus subtil que la burqua… dont a parlé l’humoriste en ultime faction ce matin sur France Inter.

La dernière de Stéphane Guillon (vidéo en cliquant sur l'image)

Dernier indice en date, donc, l’éjection de Guillon et Porte de France Inter. Rien de plus prévisible, car relevant presque d’une loi du genre : la satire n’ayant de cesse de mordre les mollets de ses proies, lesquelles ne trouvant rien de mieux que de riposter selon leurs moyens, en l’occurrence ceux des puissants. Ça finit donc en pot de terre contre pot de fer, en martyre contre bourreau. Traduction dans le texte : le PDG de Radio France, Jean-Luc Hees, proclame que « l'humour ne doit pas être confisqué par de petits tyrans ». Parole de grand sage, évidemment, mais cependant commandé par plus grand que lui, humoriste suprême adoubé par la moitié des électeurs de 2007.

Hees se justifie [Le Monde 23/6/10] en invoquant le journalisme et ses convictions qui ne sont « que journalistiques ». Ou bien il conteste l’humour de Guillon et Porte selon des critères prétendument qualitatifs, alors qu’il s’agit de satire, même matinée d’humour évidemment. Le journalisme n’a rien à voir là-dedans ; il s’agit bien d’une question politique, celle qui oppose le pouvoir à ses contestataires – ce qui se nomme aussi polémique et qui, en général, reflète la santé d’une démocratie. On notera en passant que, l’Histoire se répétant parfois, même en bégayant, le Roi n’aura pas eu nécessairement à intervenir directement : il y a les marquis pour cela, excellents pour leur zèle dans les basses oeuvres. Il en était ainsi des tartuffes pour Molière sous Louis XIV. Ou encore pour Voltaire sous le feu des monarques.

Hees ne jure que par son indépendance, comme si d’avoir été fait roitelet n’obligeait pas, par essence – l’essence même du pouvoir. Val aussi se trouve lié au même destin, l’échelon en dessous, celui du val-et 😉 en peine de prouver existence, lui le hobereau venu de Charlie Hebdo. Un vrai labeur. Il est prêt pour ça à de grandes mesures : suppression annoncée d’émissions comme «Esprit critique» (Vincent Josse) et «Et pourtant elle tourne», (Jean-Marc Four), peut-être aussi d’ « Allo la planète », et du « 7-9 du week-end ». Val, en ce sens, serait davantage le Domenech que Hees se défend d’être. Quoi qu’il en soit l’équipe France Inter va prendre un coup au moral. Et le prochain match n’est qu’en 2012.

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10 réflexions sur “Entre voile et burqa. Guillon et Porte éjectés de France Inter

  • Denis Guenneau

    Triste radio de ser­vice public, aux ordres du gou­ver­ne­ment comme au temps de l’ORTF. La réfé­rence jour­na­lis­tique n’est plus depuis plu­sieurs années France Inter, même si M. Demorand a appor­té un renou­veau, en par­ti­cu­liers avec les billets des humo­ristes mati­naux. Reste encore France Culture qui résiste, avant une remise aux pas de l’Elysée qui lui pointe au nez. Pourquoi ne pas créer une radio reflé­tant les opi­nions de gauche, à l’i­den­tique de Radio Classique qui est la voix du Medef. Question d’argent, cer­tai­ne­ment, mais les par­tis poli­tiques touchent de grosses sommes de l’é­tat pour leurs fonc­tion­ne­ments, alors, est ce une uto­pie qu’une radio de gauche, affi­chant clai­re­ment ses convictions ?

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  • Ohhh putain, il était temps que tu reviennes, merde chiée, cher Ponthieu. T’as vu le bor­del ? Tu tournes le dos et hop, les cons en pro­fitent. Je tente le libre lan­gage du Guillon et Porte, note ! Mais purée, pour­quoi désor­mais écou­ter Inter ? Inter, la voix de son maitre ? Z’ont pas tou­jours fait dans la den­telles les cama­rades, certes, mais quoi, au p’tit déj, on pou­vait cra­cher sa bis­cotte, en France, la France libre merde ! J’espère et j’en serai, que demain jeu­di, à la manif, les Woerth et com­pa­gnie s’en pren­dront plein la tronche. J’espère que la rue aura rai­son de la dérai­son, que les vrais gens mar­que­ront des buts pro­fonds. L’humour n’est pas coté en bourse mais peut cou­ter cher ! Demain, aux tristes, je leur fends la gueule !

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  • LE QUERNEC ALAIN

    VA LE CIRQUE SI ON SUPPRIME LES CLOWNS ?

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  • Dominique C

    Comme je viens de l’é­crire dans ton billet du 7 jan­vier, il « suf­fi­sait » aux valets du pou­voir d’at­tendre l’é­té… et le chan­ge­ment de grille. En cours d’an­née ç’au­rait été plus visible.

    Bon, ceci dit, je me demande ce qui serait adve­nu si le lan­gage des clowns avait été plus châ­tié. Personnellement, j’ai l’im­pres­sion que, plus que d’une véri­table ques­tion de cen­sure (car –natu­rel­le­ment– cen­sure il y a), il s’est agi d’une sorte de jeu du « chat et de la sou­ris », les chro­ni­queurs-humo­ristes ayant tes­té jus­qu’à l’ex­trême « jus­qu’où aller trop loin ».
    Ils s’en étaient expli­qués voi­ci quelque temps sur Arrêt sur images…
    Puisque, semble-t-il, c’est l’ex­pres­sion « j’en­cule Sarkozy », mise dans la bouche de Villepin, qui a ser­vi de pré­texte « idéal », on peut se deman­der si une expres­sion plus « accep­table » du genre « Je nique Sarkozy » aurait entraî­né les mêmes réac­tions. Cela n’au­rait sans doute rien chan­gé au final… mais la cen­sure idéo­lo­gique en aurait été plus évidente.
    Ouais, les idées ont-elles vrai­ment besoin de ces « gros » mots pour être caus­tiques, cri­tiques ? On se rap­pelle à quel point un Pierre Desproges pou­vait être cin­glant sans jamais se dépar­tir d’une langue châtiée…

    De toutes façons, pas d’in­quié­tude pour ces deux las­cars, ils ont de quoi gagner leur vie. C’est le public qui va en pâtir…
    Je suis bien d’ac­cord que ce qu’il nous fau­drait, ce serait une voix libre non dépen­dante du pou­voir… Une radio, ça coûte quand même, et ça va deve­nir pire quand on pas­se­ra au numérique.
    Alors pour­quoi pas des chro­niques « libres » de Porte et Guillon sur la Toile???

    Allez.… ALLEZ, Porte ! (Guillon je l’ap­pré­cie moins)

    S’il est si révo­lu­tion­naire qu’il le dit, conti­nuer à pro­duire ses papiers, non plus pour une rétri­bu­tion mais juste pour la gloire … ça devrait être pos­sible, non???
    Je sais bien qu’il faut vivre… mais tout dépend du train de vie qu’on adopte… et j’i­gnore si le Didier vit comme un bobo un pro­lo ou un grand bour­geois (les bourges, ce sont tou­jours les autres, non?)

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    • Gérard Ponthieu

      Je par­tage ton ana­lyse. Excès et pro­vocs sont tou­jours plus faciles à cen­su­rer ; ils sont « cen­su­ro­gènes » en eux-mêmes en four­nis­sant les fameuses verges pour se faire battre. Ainsi meurt-on auréo­lé de gloire au champ d’hon­neur. Mais ce n’est pas une rai­son pour admettre la cen­sure sous pré­texte qu’on lui a ouvert un bou­le­vard ! De son côté, tou­jours à France Inter, un Thomas Legrand résiste mieux alors qu’il est bien plus cri­tique sur le fond à l’é­gard du pou­voir. La forme n’af­fai­blit pas le fond. Mais les deux domaines ont peu à voir entre eux. L’un relève de la satire, donc de l’ex­cès ; l’autre de l’in­fo, donc d’une cer­taine rigueur. Chaque genre tient bien sa place – enfin tenait, car Hees ne va plus se ris­quer avec la satire. S’il avait autant de « choses » (je veux dire « couilles » en fait – j’illustre le pro­pos dont auquel on cause…) qu’il se dit indé­pen­dant, il ne crain­drait pas d’être lui aus­si balayé. D’autant qu’il arrive en fin de car­rière. Encore un qui se contente de la gloire petite de ser­vir les puis­sants. C’est ça qui vaut le mépris.

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  • Dominique Dréan

    Je viens d’a­dres­ser ce mes­sage à Stéphane Bern

    « Cher Monsieur,
    L’annonce du licen­cie­ment de Didier Porte m’a – comme vous-même semble-t-il – pro­fon­dé­ment cho­qué. J’ai beau­coup appré­cié vos prises de posi­tions loyales et cou­ra­geuses lors de ses démê­lés avec la direc­tion de France Inter.
    Depuis les attaques per­fides de Demorand, je navigue entre France Culture et France Inter pour évi­ter d’en­tendre la voix de ce sinistre petit jésuite sans tou­te­fois me pri­ver des « chro­ni­queurs au nez rouge » . Si la déci­sion annon­cée est confir­mée et que M. porte quitte votre émis­sion, je pense que j’ô­te­rai pure­ment et sim­ple­ment F.I. de mes pro­gram­ma­tions radio.
    Je me demande du reste, lorsque je vois les dis­pa­ri­tions d’é­mis­sions annon­cées, si ce n’est pas le but recher­ché par la direc­tion de la station. »

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  • Dominique C

    Dominique Dréan -> En effet, parce que si vrai­ment des émis­sions comme « esprit cri­tique » « Et pour­tant elle tourne », « Allo la pla­nète » dis­pa­raissent, que restera-t-il ?
    Mermet ?
    « Service public » ? qui aborde sou­vent des thèmes « chauds », mais dont l’a­ni­ma­trice (sym­pa­thique au demeu­rant) me semble pusil­la­nime, sinon par­fois encore bien dans l’illu­sion du déve­lop­pe­ment infi­ni. Par contre, quand je lis les com­men­taires d’au­di­teurs à son émis­sion, je me rends compte qu’il y a de + en + de gens conscients des enjeux réels des choix que nous avons à faire (et qui urgent!).
    Bon… Le pou­voir pré­fère-t-il que la sta­tion perde des audi­teurs plu­tôt qu’en gagner ? Possible…
    De la même façon qu’ils ont « cas­sé » les orga­nismes défen­dant la fran­co­pho­nie, dont ils sont en train de cas­ser la san­té, l’é­du­ca­tion etc… ils pour­raient bien choi­sir de cas­ser France-Inter… et allez, des éco­no­croques, et ceusses qui ne seront pas contents n’au­ront qu’à écou­ter RTL ou Europe 1 (sans par­ler de mul­tiples sta­tions en tous genres…)
    Moi aus­si je risque de pas­ser sur France-cul (tant qu’elle existe, du moins)

    Gérard, bien d’ac­cord avec toi sur Thomas Legrand!!!

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  • Carl Bouchaux

    Comme c’est révol­tant tout cela.
    Que l’on appré­cia ou non ces deux chro­ni­queurs c’est encore une fois la démo­cra­tie qui vient de se prendre une claque.
    J’ai bien peur que l’é­té et les beaux jours reve­nus nous réservent bien d’autres entour­loupes du même style.
    Bon ce qui nous console c’est que notre Gérard ne man­que­ra pas de nous en infor­mer. Triste mais néces­saire consolation…

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  • Dominique C

    Bernard Langlois, dans son blog de Politis, nous annonce que Porte conti­nue­ra à pro­duire des chro­niques, sur « Arrêt sur Images »… Mais hélas seule­ment une par semaine!!!

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