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Civilisations. Pourquoi Guéant n’a pas dit que des conneries

Aboyer avec, ou aboyer contre les loups, c’est toujours aboyer. S’agissant de civilisation, il devrait y avoir mieux à faire et surtout à dire. Soit donc le propos de Guéant, exerçant le ministère de l’intérieur de qui on sait et s’exprimant ce 4 février en ces termes :

 « Contrairement à ce que dit l’idéologie relativiste de gauche, pour nous, toutes les civilisations ne se valent pas. Celles qui défendent l’humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient. Celles qui défendent la liberté, l’égalité et la fraternité, nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique ». « En tout état de cause, nous devons protéger notre civilisation ».

Voilà donc le propos qui a enflammé le landerneau politico-médiatique selon le mode de la meute, donc selon la forme aboyante. Essayons de dépatouiller l’affaire qui, en ces enfiévrées périodes électorales, a vite pris l’allure d’une cabale.

Précision préalable : je ne saurais voler au secours de Guéant. Qu’il se démerde ! Surtout mon propos se veut, comme son auteur, résolument de gauche. Or, en l’occurrence, je trouve que l’idéologie gauchienne – comme on dit désormais souchienne – se met à patauger dans les fanges qu’elle prétend dénoncer.

Que le Guéant ait mitonné sa tambouille devant un parterre d’extrême droite et à l’intention délibérée de l’extrême droite dans le but de la bassement mais lourdement courtiser, on ne saurait le nier. Mais un type de droite ne dit pas forcément que des conneries. Et vice versa

Le vrai sujet du débat, merdiquement lancé, se pose tout de même sur le fond : ce qu’on entend au juste par « civilisation ». D’où cet enchaînement possible de questions dans le but d’éclairer les lanternes et surtout ceux qui les tiennent :

– Qu’est-ce qu’une civilisation ?

– Les civilisations sont-elle comparables ?

– Qu’est-ce qu’une valeur en civilisation ?

– De là : quid du relativisme ? De l’universalisme ? De leurs places dans l’Histoire, les sociétés, la morale, etc. ?

Des thèses innombrables se sont affrontées autour de ces questions et je n’aurais ni l’outrecuidance ni l’intention de tenter de les reprendre. Je ne livre donc que mes propres réponses, elles-mêmes alimentées à ma propre histoire – tout étant donc relatif, en ce sens du moins…

Une civilisation, je tenterais de la définir ainsi… : l’ensemble des valeurs, croyances, coutumes, langues et mœurs auxquelles un groupe humain se réfère de manière plus ou moins consciente, par lesquelles il s’identifie et qui en même temps le constituent.

Ces ensembles multiples varient d’autant selon la situation géographique et l’Histoire (période historique et événements). La civilisation des Indiens d’Amérique précolombienne diffère de celle qui l’a suivie. Ces variations n’ont cependant pas totalement éliminé les structures basiques des sociétés dans lesquelles on peut observer des invariants. Des changements se sont ainsi produits, plutôt qu’une évolution, qui supposerait une progressivité – voire une finalité impliquant, justement, une notion discutable de progrès. Ces changements peuvent aller jusqu’à altérer la civilisation elle-même. Et l’on sait aujourd’hui que les civilisations sont mortelles [« Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles », Paul Valéry. Au passage, à quoi donc renvoie cet englobant « nous autres » ?] On le sait en particulier depuis que le mot ethnocide désigne ce qui tue non pas les peuples eux-mêmes – génocide – mais ce qui les caractérise et les représente. C’est le cas, justement, de l’ethnocide des Amérindiens ou encore des Mnong Gar au Sud Viêt Nam, ou des menaces pesant sur les Tibétains – sans parler des Berbères en Afrique du Nord et même des Celtes chez nous…

Ainsi dirons-nous que les civilisations existent, se différencient, changent et  peuvent disparaître. En quoi elles sont donc comparables, d’autant plus qu’elles seront finement observées et analysées, si possible en dehors de tout jugement de valeur.

Pour l’observateur à vocation scientifique les comportements humains ne relèvent pas de valeurs transcendantes. Ils sont observables, analysables, comparables. Ainsi les civilisations auxquelles ces comportements se réfèrent peuvent être présentées comme relatives – c’est ce qu’on appelle le relativisme culturel.

Le succès de cette thèse, et le contresens qui en a découlé, tient en particulier à sa réduction vulgaire et abusive selon laquelle « tout se vaut ». Certes, il n’y a pas lieu d’établir des hiérarchies de valeurs – surtout morales – entre les civilisations. Mais en même temps, peut-on contester l’universalité de certaines de ces valeurs ? Ainsi, quand  Guéant déclare : « Celles [les civilisations] qui défendent l’humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient », au nom de quoi – de quelle autre de nos valeurs « occidentales » ? – pourrait-on le dénigrer en réfutant son assertion ? Assertion qu’il entoure d’ailleurs d’une certaine retenue avec son « nous paraissent », tandis que le procès d’intention peut lui être fait de décréter la suprématie absolue et définitive d’une civilisation (la « nôtre ») sur toutes les autres.

Or, précisément, selon les lieux et les époques, toute civilisation aura vu naître en son sein ici des réalisations sublimes, là les massacres les plus atroces …  Gare aux généralisations !

Non, tout ne se vaut pas, certes ! Même si tout peut plus ou moins s’expliquer et se comprendre. Mais en même temps, « nous autres » comme disait Valéry, nous tous ajouterai-je, faisons partie de la même humanité, en sa diversité de civilisations – primitives, sauvages, barbares, développées, civilisées… – précisément, selon l’Histoire, l’époque, le lieu.

L’autre volet de mon propos concerne les réactions moutonnières, sinon pavloviennes, déclenchées par cette déclaration de Guéan.

Ainsi Harlem Désir, numéro 2 du PS, y a vu "la provocation pitoyable d'un ministre réduit à rabatteur de voix FN. Une majorité en perdition électorale et morale".

Sur son compte Twitter également , Cécile Duflot (EELV) parle d’un "Retour en arrière de 3 siècles. Abject" !

Dans un communiqué, le Mouvement des jeunes socialistes (MJS) a "condamné les propos" de M. Guéant en lui "demandant "ce qu'il cherchait en s'enfermant dans son discours xénophobe et raciste. Le ministre "se range dans la catégorie de ceux qui différencient et hiérarchisent les hommes, permettant le basculement vers un véritable racisme culturel", ont-ils ajouté.

SOS Racisme dit "espérer un démenti urgent" de ces propos. "Si ces derniers, très graves, avaient été bel et bien tenus par le ministre de l'Intérieur en fonction, ils marqueraient une nouvelle étape dans une dérive vers des extrêmes inacceptables, structurés notamment par des logiques d'infériorisation de l'Autre".

Ces « EDL » – éléments de langage – d’effarouchés, qu’ils soient de droite et surtout de gauche, voilà ce que je trouve lamentable et qui me fait sortir de mes gonds de blogueur en hibernation. Je vois là une mascarade, une dérobade – soit une occasion de plus de fuir ses responsabilités et de noyer le désarroi politicien. Car la vraie question, celle qui concerne au premier chef le Parti socialiste – et avant eux les communistes, n’est-elle pas celle-ci ? : D’où vient la désaffection du « peuple de gauche » envers ses pôles historiques, partis et syndicats ? Ou autrement dit : Pourquoi cette attraction des prolétaires pour le Front national ? Prolétaires – j’insiste, à propos de ceux qu’on n’ose même plus nommer, que les situationnistes ont si justement qualifiés comme « dépossédés du plein emploi de leur vie », c’est dire leur écrasante majorité dans le monde !

Cette fois, c’est la chorale des horrifiés de gauche qui s’égosille, marquant ainsi la minable alternance de discours et de politiques qui meut le balancier entre gauche et droite – et retour. Leurs cris d’orfraie ne rameute que les bobos de très loin concernés – par exemple et entre autres, s’agissant de « civilisation » – par l’accroissement des pratiques musulmanes ostensibles. Ils n’habitent pas pour la plupart à Barbès ni dans le 9-3 ou dans les quartiers Nord de Marseille. Des déséquilibres sociologiques et culturels, ils ne connaissent que le spectacle médiatisé. Ils ont feuilleté Bourdieu mais n’ont pas dédaigné les boursicotages du social-libéralisme des années Mitterrand. Ce sont des humanistes, certes, et je peux bien me reconnaître en eux, puisque je vis aussi à l’abri relatif de ces graves tourments de nos sociétés désarçonnées. Voilà même pourquoi je la ferme (ici) depuis plusieurs mois, dégoûté et impuissant devant l’état de dégradation de notre monde. Et devant cette course en avant et droit dans le mur de la Croissance comme seul horizon et seule Salvation crypto-religieuse  : soit du Toujours Plus et toujours du Même, dans la course perdue à l’Emploi imploré, tandis que pourrit au fond de l’égoût la belle utopie, celle que caressait mon père (et bien d’autres avant lui) tout en lisant et relisant La Grande relève des hommes par la machine, d’un certain Jacques Duboin dont on recommence à parler.. Lui qui avait écrit dans les années trente : « Le chômeur, au lieu d’être la rançon de la science, devrait en être la récompense. » Alors pourrait-on parler de civilisation, et parier sur son universalité.

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24 réflexions sur “Civilisations. Pourquoi Guéant n’a pas dit que des conneries

  • Cher Gérard, quel texte !!! En véri­té, il ne m’é­tonne guère de ta part. Tu devrais sor­tir plus sou­vent de ton « trou d’hi­ver ». Je parle concer­nant le blog, car je sais que tu es un homme de l’air libre (j’é­cris cela pour ceux qui n’ont pas la chance de te connaître). Je ne vais pas ici don­ner mon point de vue sur le fond… Tu as dit beau­coup de ce que je pour­rai écrire, et de loin, beau­coup mieux pensé.
    Sur deux points seule­ment : 1/​ La réac­tion de la presse… tris­tesse… conti­nuelle désor­mais, ou presque. Une excep­tion (peut-être d’autres ?), Yvan Levaï, ce matin dans sa revue de presse sur France-Culture qui a cité l’en­tier pro­pos de C. Guéant. 2/​ La poli­tique… Mon approche avec elle est élas­tique… et si on se dit « On y revient » pour ne pas la lais­ser à d’autres, mal­gré mon enga­ge­ment actuel, il est de nom­breux jours où je me dis que c’est au prix d’ef­forts qui n’at­teignent en rien, ou presque, leurs objec­tifs. Ces EDL (Magnifiques EDL, je l’emploierai… avec cita­tion évi­dem­ment !) sont révé­la­teurs du pire : le manque d’hon­nête, d’in­tel­li­gence, de vision. Et de capa­ci­té de com­bat, de débat démo­cra­tique. Sur ce sujet comme tant d’autres. Et pour­tant, tu le sais, mais je pro­fite de l’oc­ca­sion pour « souiller » ton blog :=) je vais voter Hollande au pre­mier, et au second tour. Et je ne me résous pas à écrire… sans espoir.

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  • Faber

    Bravo mec le Ponthieu. J’apprécie notam­ment la fin de ton billet. Cette fou­tue crois­sance ser­vie chaque jour autant que l’aus­té­ri­té. Comme si le pôle nord allait rejoindre le pôle sud. Est-ce que mon fils va conti­nuer à croître, lui qui fait déjà 1,85cm à 19 ans ? Faire plus, bouf­fer plus, chier plus et sur­tout en baver plus ! Ce mur de la crois­sance aus­si haut qu’in­juste bahhhh. Mur de souf­france qui sépare les nan­tis de ceux bossent pour leur payer leurs pri­vi­lèges. Serait-ce ça qui nous dis­tingue des barbares ?

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  • BION

    Ainsi, dans l’histoire, la véri­té n’est-elle pas un enjeu de luttes per­ma­nentes où les sym­boles cultu­rels s’affrontent ? Peut-on recon­naître l’existence de notre ‘’réduit’’ cultu­rel, géné­ré par ce que nous recon­nais­sons comme base de notre propre civi­li­sa­tion ? D’autres his­toires doivent  »exis­ter ».

    Parfaitement illi­cite ce prin­cipe de fonc­tion­ne­ment de notre civi­li­sa­tion du  »TROP » qui pour­tant ne nous parle que de solu­tion par la  »CROISSANCE »
    En lais­sant aller cette crois­sance, fac­teur de des­truc­tions, au lieu de ten­ter un ‘’assez col­lec­tif’’, ne faut-il pas craindre le drôle de regard qu’on nous a déjà jeté … et qu’on en prenne bien­tôt plein la g… ?
    A moins d’espérer en nos ‘’forces d l’ordre’’, lar­ge­ment pro­vi­sion­nées dans nos casernes ?

    Pourtant : « il faut bien que ça s’arrête, si on veux que ça continue ! »

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  • Dominique Dréan

    J’ai pas tout com­pris, alors je vais relire demain et – éven­tuel­le­ment – com­men­ter alors. J’éprouve moi-même un trouble pro­fond en me trou­vant confron­té à cer­taines « valeurs » de civi­li­sa­tions aux­quelles je me frotte (au sens figu­ré uni­que­ment hélas) très sou­vent. Quand même, j’ai peine à admettre qu’un Français puisse por­ter un juge­ment caté­go­rique sur des civi­li­sa­tions aus­si faux-culle­ment dési­gnées. Tu l’as vue ta grosse poutre ! Qui sommes-nous, nous, sujets dévoués du cha­noine hono­raire de Saint Jean de Latran à talon­nettes, pour éva­luer les civi­li­sa­tions des autres. Balayons devant notre porte, il n’y aura plus de cha­noine à talon­nettes et plus de Guéant et on pour­ra pen­ser en paix…éventuellement.

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  • Cléo

    Moi aus­si j’ai été dégou­té par ce que vous appe­lez la cho­rale. Chorale des pleu­reuses habi­tuellles, et pleu­reurs qui courent der­rière leurs illu­sions perdues.

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  • vincent

    Merci Gérard pour ton texte qui agite les neu­rones. J’adore.

    Pour ma part, quoique de droite, je pense que dans l’ab­so­lu toutes les civi­li­sa­tions humaines se valent. Simplement parce que, comme tu le dis, elles sont mor­telles, et nous autres aus­si, pauvres obser­va­teurs pseu­do scien­ti­fiques (je dis « pseu­do » parce qu’il me semble qu’il y a de l’ou­tre­cui­dance à se croire objec­tif sur un objet qui nous englobe et nous déter­mine com­plè­te­ment). Bref, quand la pla­nète aura été pous­sié­ri­sée, nos civi­li­sa­tions seront deve­nues extrê­me­ment relatives.

    En revanche, à l’ins­tant T chaque obser­va­teur peut clas­ser les civi­li­sa­tions en fonc­tion de ses propres valeurs. Le pro­blème est que les valeurs humaines varient for­te­ment dans le temps et dans l’es­pace. Les Aztèques consi­dé­raient les pillards conquis­ta­dors comme de purs bar­bares (non­obs­tant Quetzalcóatl), et de leur coté les espa­gnols étaient hor­ri­fiés par les rivières de sang qui dégou­li­naient des pyra­mides à sacri­fices. Du coup les espa­gnols ont mas­sa­cré tout le monde… Quelque soit nos civi­li­sa­tions, de Gengis-Khan à Hitler ou de Pharaon à Pol-Pot, elles se rejoignent tou­jours dans l’horreur.

    Mais nous rejoi­gnons aus­si dans la pure beau­té des arts où nous ten­tons de repré­sen­ter nos infi­nis. Pour moi les pein­tures de la grotte Cosquer n’ont pas grand chose à envier à la Sainte Victoire de Cézanne. C’est là, me semble-t-il, et là uni­que­ment que l’on peut cher­cher les valeurs uni­ver­selles de notre huma­ni­té. Dans la façon dont les civi­li­sa­tions expriment ce qu’elles ont de plus pro­fond en elles. Foin des idéo­lo­gies modernes pré­fa­bri­quées par untel ou untel et qui échouent dans les lamen­ta­tions au pre­mier impré­vu qui passe.

    Au fond je dois être rela­ti­viste, n’en déplaise à mon Eglise, n’en déplaise à Mr Guéant. Guéant qui oublie que les fran­çaises n’ont le droit de vote que depuis 1948, et moi qui me sou­vient d’une pho­to de ma mère petite fille por­tant un voile à l’é­cole (on appe­lait ça un fichu)… Et puis je ne connais aucune civi­li­sa­tion, ni d’aujourd’hui ni d’hier, qui « nie l’humanité ». Bref, Guéant raconte des c..ies mais la gauche fait ch..r à tou­jours vou­loir déci­der ce que les gens doivent penser.

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    • Gérard Ponthieu

      Eh ben mer­ci aus­si Vincent pour tes agi­ta­tions neu­ro­nales ! A mon tour, à pro­pos de ce mot de « civi­li­sa­tion », tel­le­ment fourre-tout comme on l’en­tend depuis l’en­vo­lée de Guéant. Tu cites Gengis-​Khan, Hit­ler, Pha­raon, Pol-​Pot etc.; selon moi, ne pas confondre les acteurs et figures his­to­riques avec la civi­li­sa­tion qu’ils magni­fient ou per­ver­tissent pour le pire. Ces per­son­nages, en nous inter­ro­geant, nous ren­voient pré­ci­sé­ment sur ce qu’est ou pas une civi­li­sa­tion. Tu mets en avant le cri­tère du beau ; j’au­rais ten­dance à te rejoindre là-des­sus, tout en rap­pe­lant son carac­tère on ne peut plus sub­jec­tif – qui, cepen­dant, peut tendre à l’u­ni­ver­sel (les « mer­veilles » du monde). En termes plus poli­tiques, le cri­tère de soli­da­ri­té me semble très per­ti­nent pour éva­luer le degré de civi­li­sa­tion. Or, il peut être tota­le­ment – tota­li­tai­re­ment – sub­ver­ti (les nazis soli­daires dans l’in­hu­ma­ni­té…). Au fond, ça balance tou­jours dans l’Histoire et les civi­li­sa­tions entre rela­ti­vi­té et uni­ver­sa­li­té, non ?

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      • vincent

        Tu as rai­son, on peut tout mettre dans le mot « civi­li­sa­tion », mais quand on a besoin de par­ler il faut bien uti­li­ser les mots qu’on a, sur­tout quand on essaye de faire court. Au fait quid des peuples d’Océanie et de Nouvelle Guinée qui n’ont guère que l’an­thro­po­pha­gie et quelques masques à leur actif, civi­li­sa­tion or not ? Perso je dis oui, sans hési­ter. Raccourcis aus­si les Gengis-Khan and Co, mais qui sont des pro­duits de leurs civi­li­sa­tions et qui parlent à nos ima­gi­naires. Les mon­gols pour dire la civi­li­sa­tion indo-euro­péenne. Hitler pour l’ef­froyable chute de notre propre civi­li­sa­tion euro­péenne. Pharaon pour rap­pe­ler que la chasse aux juifs ne date pas d’hier, mais aus­si pour les fel­lahs du Nil qui en 2010 vivaient à peu près du tou­risme et qui crèvent la dalle en 2012. Quant à Pol-Pot il repré­sente d’autres erre­ments de nos idéo­lo­gies euro­péennes… Décidément, nous ne sommes pas qua­li­fiés pour don­ner des leçons de civi­li­sa­tion aux autres peuples. Eux non plus d’ailleurs.

        Je ne suis pas vrai­ment convain­cu par ton cri­tère de soli­da­ri­té. Il me semble que tous les peuples et toutes les civi­li­sa­tions (comme on vou­dra) pra­tiquent la soli­da­ri­té, cha­cun à sa manière, à sa mesure, presque tou­jours dans son propre groupe social. Notre soli­da­ri­té fran­çaise fonc­tionne parce que nous avons beau­coup de moyens, mais elle com­mence et finit avec nous-mêmes. D’accord pour la redis­tri­bu­tion fis­cale, le RSA, les res­tos du coeur, mais rien ou seule­ment des miettes pour les vrais pauvres de ce monde à Madagascar, en RDC, au Soudan. Là bas aus­si il y a des soli­da­ri­tés internes, certes moins bien orga­ni­sées et avec peu de choses à dis­tri­buer, mais bien réelles. Même les nazis avaient une soli­da­ri­té (impec­cable)… entre eux ! Tu vois, je reste un vilain relativiste…

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        • Gérard Ponthieu

          Faut-il le pré­ci­ser : je parle de soli­da­ri­té dans le sens du bien com­mun, pour plus d’hu­ma­ni­té – pas le contraire ! Là où je rejoins George Orwell et sa « décence com­mune » (j’en ai cau­sé plu­sieurs fois sur ce blog, tape « orwell » dans la case de recherche). C’est aus­si l’i­dée d’en­traide qu’on trouve chez Kropotkine (L’entraide, un fac­teur de l’é­vo­lu­tion) et avant lui chez Darwin (La des­cen­dance de l’homme). Bien sûr, ça vaut pour les peuples loin­tains (loin de nous autres « civi­li­sés »…), et même en pre­mier comme tu le suggères.
          Les his­toires de civi­li­sa­tions ne sont pas aus­si tran­chées que les cli­vages droite/​gauche – qui ne le sont par­fois pas du tout ! Je me com­prends… (et c’est déjà ça ;-))

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  • Alain Heurgon

    J’ai même enten­du dans le poste Raffarin citer Levi-Strauss. Ou alors c’é­tait Carlos qui chan­tait la Walkyrie ? Dans tout ça, je me demande tout de même si on mélange pas cultures, races, reli­gions. Vousme direz que c’est sans doute tout ça que recouvre le mot civi­li­sa­tion et que cha­cun prend l’af­faire par le bout qui l’ar­range. Je suis quand même ok avec Ponthieu, y a pas de quoi mon­ter sur ses grands canas­sons gauches et lour­dingues du sabot dans la même pan­toufle. Même Hollande a pas pu s’empêcher, croyant que ça grap­pi­le­rait quelques pour­cents. Mais les tarés c le F haine qui s’empifre ! Parlons pinard et sau­ci­flard, ça c’est du sérieux !

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  • Gérard Ponthieu

    Ça y est, à l’Assemblée aujourd’hui, on a donc atteint le point Godwin, celui qui marque toute dis­cus­sion mal enga­gée ; de sorte qu’elle finit dans l’im­passe d’une com­pa­rai­son ou allu­sion impli­quant les nazis ou Adolf Hitler.

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  • JF paux

    Salut Gérard,
    Je ne suis pas sur­pris de consta­ter que cette allo­cu­tion de notre sinitre de l’in­té­rieur (comme disait Coluche) ait allu­mé une telle polé­mique (objec­tif atteint?). D’ailleurs, à l’heure où j’é­cris ces mots elle a rebon­dit à l’Assemblée suite à l’in­ter­ven­tion de Serge Letchimy, dépu­té de la Martinique, qui a pro­vo­qué le départ du gou­ver­ne­ment de l’hé­mi­cycle. Je salue là ta prise de posi­tion « à contre cou­rant » et tes argu­ments se tiennent. Pourtant, Claude Guéant n’a pas confon­du régime poli­tique et civi­li­sa­tion, chaque mot dis­til­lé en public est sou­pe­sé, choi­si et les élé­ments de lan­guage four­bis dans cette cam­pagne qui s’an­nonce vio­lente, ce ne sont pas les cris d’or­fraie des socia­listes, mais cette stra­té­gie minu­tieuse mise en place par l’en­tou­rage du Président pour séduire la droite de la droite. On ne me fera pas croire que Guéant allait don­ner une leçon d’hu­ma­nisme à ces jeunes étu­diants chaus­sés de ran­gers, en ter­mi­nant son allo­cu­tion par « nous devons pro­té­ger notre civilisation »…

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  • Bernard

    Beaucoup d’hon­neur pour des pro­pos vio­lem­ment raciste et dans les­quels il n’y a aucune conne­rie puis­qu’ils ont tota­le­ment atteint leur but.

    Bernard

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    • Gérard Ponthieu

      Le Mouvement International pour une Ecologie Libidinale (M.I.E.L.) vient d’a­che­ver la numé­ri­sa­tion des 39 numé­ros de la revue Sexpol, que j’ai ani­mée de 1975 à 1980. Cette publi­ca­tion, qui sera annon­cée ici pro­chai­ne­ment, comme il se doit, se trouve ras­sem­blée sur un DVD ven­du au prix coû­tant. Précision impor­tante, notam­ment à l’in­ten­tion des auteurs du lien ci-des­sus (« acor­gone ») : Les conte­nus de cette nou­velle publi­ca­tion sont mis à dis­po­si­tion selon les termes de la licence Creative Commons Attribution – Pas d’Utilisation Commerciale – Pas de Modification.
      Cela ne signi­fie pas l’a­ban­don des droits d’au­teur rela­tifs à la pro­prié­té intel­lec­tuelle. Cela implique que les termes de la licence Creative Commons Attribution soit expres­sé­ment repor­tés sur tout ou par­tie des docu­ments repro­duits. Simple mais indis­pen­sable for­ma­li­té pré­ser­vant de cette dis­po­si­tion pré­ser­vant la nature non com­mer­ciale des échanges entre les savoirs. Merci à « acor­gone » de res­pec­ter cette modalité.

      Le DVD Sexpol peut être com­man­dé ici :
      http://​www​.eco​lo​gie​li​bi​di​nale​.org/​f​r​/​m​i​e​l​-​r​e​v​u​e​s​e​x​p​o​l​-​f​r​.​htm

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      • Rassurez-vous, la licence Creative Common et le main­tien des droits sont très bien spé­ci­fiés sur la page men­tion­née : et acor­gone n’a jamais rien ven­du de la vie, acor­gone la par­tage. Vous auriez tout aus­si bien pu nous contac­ter à l’a­dresse indi­quée : tout est vrai !

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        • Gérard Ponthieu

          Alors pas de pro­blème, tout va bien !

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  • Il y a deux manières d’in­ter­pré­ter ce mot « civi­li­sa­tion », devant et der­rière un fusil : celui qui le tient est le civi­li­sa­teur, celui qui se trouve devant est à civi­li­ser. Bon… fusil, ten­sion éco­no­mique, pétrole ou com­merce inter-nation, tout cela c’est du pareil au même. Suivant donc qui tient le fusil et sa nature, le mot n’au­ra pas la même signi­fi­ca­tion : il s’a­gi­ra tou­jours de jus­ti­fier le fait qu’on fasse tra­vailler un Autre pour le moins cher pos­sible ; et par consé­quent son usage même trou­ve­ra lieu à inter­pré­ta­tion : ici , une jus­ti­fi­ca­tion, là une reven­di­ca­tion. En fait, rien que du bla­bla de men­teurs, les uns d’une estrade, les autres le regard vers les cieux !

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  • J’ai un peu de mal à y voir clair dans tout ça…
    En tout cas beau­coup de mal à écrire sur le sujet.

    Je peux éven­tuel­le­ment « musi­quer » la civilisation…
    C’est plus sur ! cha­cun son domaine !
    http://f.lovisolojob.free.fr/Blog/index.php/2010/05/26/civilisations/

    Quand aux pro­pos Guéant… Le per­son­nage, comme la plu­part de ses col­lègues de tous bords, ne m’ins­pire aucune confiance .

    Sommes-nous tou­jours une civi­li­sa­tion ? Bonne ou mauvaise ?
    Je ne sau­rai le dire tant le sys­tème s’épuise.
    Mais nous aurons l’occasion d’en repar­ler lors d’un pro­chain concert…
    @ bientôt…
    Frank

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  • J’étais pas­sé à côté, mais c’est excellent !

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  • Gérard Bérilley

    Très bon texte (que je n’a­vais pas encore lu, étant un lec­teur plus récent). Selon moi les civi­li­sa­tions ne sont et ne peuvent être égales, car s’il en était ain­si aucun pro­grès ne pour­rait avoir lieu à l’in­té­rieur d’une même civi­li­sa­tion, puisque le résul­tat du pro­grès serait dans ce cas équi­valent à ce qu’il y avait avant ce pro­grès ! Non, tout dépend d’a­près les cri­tères d’a­près les­quels nous jugeons. Une civi­li­sa­tion répres­sive a‑t-elle la même valeur qu’une civi­li­sa­tion libertaire ?
    J’emploie à des­sin l’ex­pres­sion « civi­li­sa­tion liber­taire », terme créé (à ma connais­sance) et prô­né par le théo­ri­cien socia­liste liber­taire et anar­cho-syn­di­ca­liste Gaston Leval (1895 – 1978), bakou­ni­nien et kro­pot­ki­nien convain­cu, pour défi­nir l’ho­ri­zon huma­niste vers lequel tout socia­lisme sin­cère devrait tendre. Gaston Leval connais­sait les thèses de Jacques Duboin (un homme lui aus­si vrai­ment à redé­cou­vrir), mais à l’é­poque Leval (théo­ri­cien majeur de l’a­nar­chisme espa­gnol) pen­sait que l’on était encore loin de l’a­bon­dance (l’Espagne était dans une pau­vre­té incroyable). La solu­tion actuelle me semble dans la syn­thèse entre Duboin et les théo­ri­ciens liber­taires. Pour info, l’on doit, entre autres, à Gaston Leval, un livre mer­veilleux « Espagne liber­taire 36 – 39 L’oeuvre construc­tive de la révo­lu­tion espa­gnole », tota­le­ment édi­té sur Internet. D’autres textes théo­riques de lui se trouvent aus­si sur Internet.

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    • Tu ravives de vieux sou­ve­nirs ! Celui de Gaston Leval jus­te­ment, que des amis anar­chistes espa­gnols avaient fait venir à Strasbourg pour témoi­gner de l’his­toire récente. Image d’un homme de petite taille, fort modeste, évo­quant les « com­munes liber­taires » d’Aragon. C’est un peu effa­cé dans ma mémoire… Merci, Gérard, d’a­voir fait remon­ter tout ça à la surface.

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      • Gérard Bérilley

        Eh oui, c’est tout à fait cela ! Moi aus­si j’ai eu la chance de le voir une fois, en 1975, lors d’une semaine consa­crée à l’Espagne, dans une Maison des Jeunes, où le thème en était le com­mu­nisme liber­taire. Je me suis retrou­vé plus d’une fois, et même pour ain­si dire tou­jours, dans sa cri­tique de l’a­nar­chisme fran­çais. Le tour­ment de sa vie – la dégé­né­res­cence de l’a­nar­chisme en res­sen­ti­ment, l’ou­bli de la gran­deur de la pen­sée des Bakounine, Kropotkine, Guillaume, de l’as­pect construc­tif du socia­lisme liber­taire – fut aus­si pen­dant des années le mien. Gaston Leval est peut-être l’homme le plus remar­quable que j’ai pu voir, je me le suis plus d’une fois dit. Son impor­tance pour libé­rer en 1921 cer­tains anar­chistes empri­son­nés dans les geôles bol­che­vistes est consi­dé­rable, ain­si que sa dénon­cia­tion de ce sys­tème inhu­main dès 1921, et c’est grâce à lui si la CNT n’est pas entrée dans l« Internationale des Syndicats rouges ! J’ai lu
        et médi­té beau­coup de textes de lui, textes magni­fi­que­ment écrits où il y a une gran­deur, une absence totale de res­sen­ti­ment. Gaston Leval fait par­tie à jamais de la bonne dizaine de « héros » qui m’ont per­mis de construire ma pensée.

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