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Homélie du Mali. De la guerre et de la civilisation

Tout conflit signe une certaine humanité, celle qui se cherche en s’opposant tout en cherchant son harmonie. Mais la guerre ? La guerre, c’est la part d’inhumanité, l’échec face au conflit dans l’incapacité à le résoudre autrement que par la violence – qui ne résout rien. Mais alors, la guerre au Mali ?

Tel est le thème de mon homélie dominicale, alimentée par l’échange de tweets suivant :

 

– « Gracchus Babeuf » : L'intervention au Mali pour rendre service à Areva ? Non, on a un président de Gauche qui combat la Finance ? C'est ça j'ai bon ? Hein ? 


– Moi : Ces amalgames, c'est d'un nul ! Presqu'aussi binaire que les fous d'Allah.

– « G-B »: Sûrement, mais alors pourquoi ? Par bonté d'âme ?

– Moi : Ben quoi, t'aurais laissé faire ces "libérateurs" ? Dis voir ta recette.

 

Fin de l’échange.

 

je penseDans sa si lente évolution, l’humanité peine à se défaire de son animalité. C’est aussi que sa part instinctive lui procure des avantages réels en termes de survie et de reproduction notamment, ce que Darwin qualifiait de caractères bénéfiques pour l’espèce. L’agressivité relève de ces comportements bénéfiques, en même temps qu’elle se heurte à l’évolution sociale – la quête d’harmonie entre les individus et entre les groupes. C’est de cette évolution qu’a émergé ce qu’on appelle la civilisation, cet effort des humains vers l’humanité en marche.

 

Évolution lente, donc – à l’image tu temps long qui traverse préhistoire et histoire, selon une direction non linéaire, en fait sinueuse au possible et parfois même régressive. En quoi il s’agit bien d’une construction humaine, donc hésitante et imparfaite, non téléologique, pour employer un gros mot qui sépare, là encore, les tenants du matérialisme de ceux du déterminisme finaliste. Séparation qui culmine, en particulier aux Etats-Unis de manière visible et même spectaculaire, entre scientifiques évolutionnistes et créationnistes. Lesquels considèrent que l’origine du monde remonte à 6000 ans, puisque c’est écrit dans la Bible. Ces sornettes ayant aujourd’hui du mal à tenir debout – du moins dans les esprits un peu éclairés – leurs partisans se sont… adaptés. Ainsi ont-ils « évolué » en adoptant le concept du « dessein intelligent » (intelligent design), version étatsunienne du Grand horloger qui, dans l’Europe du XVIIIe siècle, divisait déjà les tenants des Lumières.

Mais la guerre au Mali dans tout ça ?

N’est-ce pas la question : celle de la résistance à l’obscurantisme ? Les Maliens ne s’y trompent pas quand ils acclament l’intervention militaire française. Une néo-colonisation ? Ou un rempart contre ces fanatiques assassins qui, au nom d’Allah et de la charia, tient, violent, pillent ou, au « mieux », amputent, fouettent, dégradent les femmes en les terrant chez elles ou en les voilant, détruisent livres et bibliothèques, interdisent la musique ?

 

Que la droite umpiste, après avoir applaudi l’intervention française, se ressaisisse par obligation idéologique et partisane, soit ! Que des gauchistes patentés s’enferrent comme à l’habitude dans leur rôle de tenanciers de chapelles, bof ! Qu’un Mélenchon pointe un doigt vengeur de prophète ! Mais pas certains de mes potes de gauche, d’ordinaire éclairés, qui s’empêcheraient sous prétexte de non-hollandisme, non !

 

Si toute guerre est déplorable – voir le début de cette homélie –, elle l’est comme conséquence de l’impossible harmonie en ce bas monde. Et non du fait qu’il n’y aurait pas de causes justes. Tout comme le sont les trois mots emblématiques de notre République, et ce qui s’ensuit en termes de justice et de laïcité. D’humanité.

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8 réflexions sur “Homélie du Mali. De la guerre et de la civilisation

  • BION

    Et si le modèle de vie occi­den­tal, avec ses grands trop, ali­men­tait bel et bien des tenants d’al­ter­na­tives ; des lea­ders révo­lu­tion­naires impli­ci­te­ment sou­te­nus par les lais­sés pour compte de nos divers cir­cuits de performances ?
    Leurs excès ‑consé­quen­tia­lisme- ne seraient que réac­tions pro­por­tion­nées aux pou­voirs en place et à ses dégats ?
    En ce cas, une recette (dure à digé­rer) : muta­tis mutan­dis d’a­bord chez les occidentaux …
    Mais l’his­toire sem­ble­rait mon­trer que les choses ne bougent pas … avant que se coupent des têtes ?

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    • Gérard Ponthieu

      Bien sûr, l’Histoire n’ar­rête jamais sa marche et l” « actua­li­té » en exprime la sur­face, par­fois la super­fi­cia­li­té, sur­tout quand les médias ne montrent que l’ins­tant, sans le contexte. C’est leurs limites dans leurs contraintes – com­mo­dé­ment admises – du temps, de la place, du « public » qui ne com­pren­drait pas, etc.

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  • Une Homélie de cette nature, je ne la rate pas… Mieux, je la dif­fuse sur mon face­book et Google +. C’est comme ça, un vieil ins­tinct, un réflexe d’a­ni­mal… de rai­son je crois.

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  • Gaby

    J’ai rien compris.
    Vous pour­riez pas faire plus simple ?

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    • Gérard Ponthieu

      On fait ce qu’on peut, ce qui n’est pas si simple…

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  • Dominique Dréan

    Cet éloge (?) de la len­teur me file le bour­don. Bion, en affir­mant que « les choses ne bougent pas … avant que se coupent des têtes » évoque sans doute notre révo­lu­tion à nous, l’é­té fran­çais. Mais que dire des prin­temps arabes aux quels ont suc­cé­dé la même chose qu’a­vant peinte d’une cou­leur à peine dif­fé­rente ? C’est tou­jours la lente évo­lu­tion, déca­pi­tés ou pas.
    La guerre de reli­gion (ou éco­no­mique, c’est kif kif) qui se déroule au Mali offre effec­ti­ve­ment la pos­si­bi­li­té d’a­dop­ter toutes les pos­tures. C’est une ques­tion d’angle de vue ou d’angle jour­na­lis­tique. Et aucune de ces pos­tures n’in­flé­chi­ra la cours des choses, même le doigt de Mélenchon.
    Jehan Jonas, un chan­teur « enga­gé » comme on se plai­sait à l’être dans les années… que tu sais, disait « Tu seras pour ou contre, et quand tu l’au­ras dit, t’i­ras t’as­seoir devant ta soupe, avant qu’elle refroi­disse, avant que même le roy­co s’révolte ».
    A défaut d’ho­mé­lie, un petit béné­di­ci­té et hop, bon appêtit !

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  • Gian

    Bien Mali acquis ne pro­fite jamais, comme dirait Franck L. .

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