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L’Équipe à genoux devant le client Roi

« Journalisme sportif » : un oxymore. C'est-à-dire l'alliance incongrue de deux éléments aussi opposés que l’huile et l’eau. Summum du genre atteint par L’Équipe qui, au lendemain du match PSG-OM, n’a pas craint d’accommoder son lectorat en ménageant la chèvre PSG et le chou OM (c’est une image, hein !). Et voilà le tableau, selon l’édition, parisienne ou marseillaise :

Imaginons L'Huma publiant une édition de droite…
Imaginons L'Huma publiant une édition de droite…

Comme le note Daniel Schneiderman (Arrêt sur images), les hebdos aussi « sont coutumiers des couvertures régionalisées. "Le vrai pouvoir à Montpellier", "Strasbourg demain", "les dix qui font Le Havre", "ceux qui comptent à Vierzon": en couverture du Point ou de L'Express, ça en jette au lectorat local, supposé flatté que la presse parisienne, du haut de Sa Parisianitude, s'intéresse à lui. »

Le mérite de L’Équipe, si on peut dire, c’est de mettre carrément les pieds dans le plat de la démagogie clientéliste ou, vulgairement parlant, du léchage-de-cul.

On dira qu’après tout, ce n’est jamais là que l’application à la presse sportive d’un bon principe de marchandisage : plaire au client, qui est Roi.

Où l’on voit bien aussi qu’il y a lieu de distinguer entre crise des médias et crise du journalisme, et ne pas réduire la réflexion à l’opposition toile contre papier.

 

Post scriptum, dans la foulée et en version "couvrez ces épaules que je ne saurais voir" :

Oscars: Une agence de presse iranienne recouvre les épaules de Michelle Obama

 

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11 réflexions sur “L’Équipe à genoux devant le client Roi

  • Au bon sou­ve­nir de mes années de CFPJ, j’a­vais bien noté l’a­vis éclai­ré d’un prof et ancien de l’Équipe : « on ne doit pas dire jour­na­liste spor­tif, mais jour­na­liste de sport ». Car bien peu sont spor­tifs de fait.
    A l’heure où le jour­na­lisme est un sport col­lec­tif de foire d’empoigne, au sens où il faut tordre le bras de l’in­fo pour ne pas cho­quer le lec­to­rat de masse (notion éco­no­mique très dif­fé­rent de celle de lec­teur qui lui garde un cer­veau indi­vi­duel), ce type de mise en pers­pec­tive inté­res­sante ne semble plus de mise.

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    • Gérard Ponthieu

      Daniel, on connaît aus­si de bons confrères « de sport » donc. Mais conti­nuons à appe­ler « jour­na­lisme spor­tif » ce qui relève, soit d’un sous-jour­na­lisme, soit d’un impos­sible jour­na­lisme. Je pen­che­rais plu­tôt pour ce der­nier en ce sens qu’on ne peut trai­ter de la com­pé­ti­tion sans prendre par­ti, in pet­to. C’est donc à son corps défen­dant qu’il fau­drait viser l” « objec­ti­vi­té spor­tive » – autre oxy­more. Le mieux serait peut-être de renon­cer à cette pré­ten­tion jour­na­lis­tique pour ser­vir car­ré­ment les épo­pées spor­tives – et leurs inté­rêts marchands.
      Et je me rends compte, en écri­vant, qu’on peut tout aus­si bien dire la même chose du jour­na­lisme poli­tique ! Les chro­ni­queurs poli­tiques font pareil, mais savent mieux manier la langue de bois, ce qui leur donne des allures d” « ana­lystes » plus ou moins subtils.
      D’un côté, les lèche-cul, de l’autre les faux-cul. Toujours des his­toires de cul !

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  • Dominique Dréan

    J’ai enten­du cela ce matin. Même pas sur­pris ! Il serait inté­res­sant de mettre en paral­lèle les titres des jour­naux locaux, je pense que ça suit la même « logique ». « Ecrire pour son lec­teur », c’est une maxime que l’on peut pous­ser très loin, jus­qu’à faire un jour­nal par per­sonne par exemple.

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  • BION

    Et si on lais­sait tom­ber ces matchs, si on ne les regar­dait plus à la télé­vi­sion, si on ne lisait plus ces revues d’ath­lètes en tous genres … ; ath­lètes tel­le­ment dopés de salaires miri­fiques et enca­drés de clubs, de pubs, de marchands …?
    Le grand cirque actuel, avec les luttes entre les pays ‑cf. notre belle mon­dia­li­sa­tion – serait peut-être alors moins vaillant ?
    La per­for­mance : suf­fra­gée par ceux-la mêmes qu’elle exploite.
    Peut-être, relire « L’éloge de la fuite » ?

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  • Remi Folot

    Les jour­na­leux de foot sur­tout en tiennent une couche ! Le peu que j’en­tends dans le poste… Les foo­teux, ce qu’ils ont à dire de mieux c’est avec leurs pieds. Et les jour­la­neux qui veulent les faire cau­ser, comme ils sont encore plus cons on voit ce que ça donne. au fond, le pb c’est les jour­na­listes, pas les spor­tifs – ceux là font ce qu’ils peuvent, les autres ben ils peuvent pas grand chose…

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  • Julie

    Encore heu­reux que mon mec ne la ramène pas sur ce cha­pitre. Il regarde un match de temps en temps, sans kro ni bis­cuits apé­ro. Il pré­fère le rug­by d’ailleurs. Tout ça c’est sur­tout des affaires de mecs, ça vaut tou­jours mieux que d’al­ler à la guerre!!!

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    • Dominique Dréan

      euh oui, « Qu’un sang impur abreuve nos sillons » qu’ils chantent…

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      • Gérard Ponthieu

        Cher Dominique,
        Plus que de la vieille his­toire, ce « sang impur » c’est un mal­en­ten­du tenace que pour ma part, vieil anar, je n’ai démê­lé que tar­di­ve­ment après avoir com­blé quelques lacunes his­to­riques remon­tant à Napoléon (ouh !) et à ses guerres révo­lu­tion­naires. Eh oui, se sou­ve­nir que l’Europe roya­liste vou­lait faire la peau à cette Révolution qui avait déca­pi­té l’un des leurs, le ci-devant roi de France. On ne peut com­prendre le sens de la Marseillaise sans ce contexte, et cette expli­ca­tion de texte, cap­tée sur la toile dans une dis­cus­sion sur le sujet :

        « A l’é­poque ce qu’on appe­lait le sang pur c’é­tait le sang des nobles qui seuls pou­vaient pré­tendre à des fonc­tions d’of­fi­ciers dans l’ar­mée. Lors de la révo­lu­tion et notam­ment de l’at­taque des Autrichiens, les nobles se sont enfuis et ne res­taient donc que des sangs impurs, par oppo­si­tion au sang pur, qui étaient des gens du peuple qui pren­naient les armes pour com­battre l’envahisseur.

        « Et les sillons sont des tran­chées creu­sées un peu par­tout dans la cam­pagne et les champs lors des san­glantes batailles.

        « Qu’un sang impur abreuve nos sillons » signi­fie donc que c’est notre sang impur à nous le peuple qui nour­ri­ra nos terres.

        En aucun cas il ne s’a­git du sang de l’en­ne­mi. Ce serait bizarre quand même de chan­ter que le sang de l’en­ne­mi nour­rit nos terres, nos sillons.

        « On peut repro­cher beau­coup de choses à la Marseillaise, notam­ment son esprit guer­rier, mais pas le sang impur, déso­lé pour les incultes. »

        « Incultes », enfin igno­rants suf­fi­ra à ceux qui en apprennent chaque jour.

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  • Dominique Dréan

    Merci, cher Gérard, pour cette expli­ca­tion de texte. Il ne m’a­vait pas échap­pé que la mar­seillaise devait s’en­tendre dans son contexte, même si j’é­tais tota­le­ment inculte sur le contexte en ques­tion. Je me cou­che­rai donc moins igno­rant ce soir.
    Je ne suis pas sûr,cependant, que les 15 poi­lus qui chantent cela avant d’al­ler bouf­fer de l’Anglais sur un ter­rain de rug­by (plus exac­te­ment se faire bouf­fer par les temps qui courent) ne prennent pas leur hymne au pied de la lettre.
    Plus géné­ra­le­ment, je pense que ce texte est dépla­cé en toutes cir­cons­tances, par­ceque la plu­part de ceux qui le chantent ne le com­prennent pas comme tu l’ex­pliques. Et quand bien même ils le com­pren­draient, la révo­lu­tion c’est comme la bohème d’Aznavour, ça ne veut plus rien dire du tout !

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    • Gérard Ponthieu

      Mais oui, tout à fait d’ac­cord avec ton argu­ment. Il faut comp­ter avec l’i­gno­rance, cette forme de la réa­li­té. Et puis aus­si comp­ter avec et sur l’hu­mour. Ouah, la Bo-hê-meuhhhh !

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  • Gian

    Lire ou relire « Le foot­ball, une peste émo­tion­nelle », de Jean-Marie Brohm et Marc Perelman, Gallimard-Verdier folio 1222006.

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