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Paco de Lucia (1947-2014)

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Paco de Lucía, Festival de Timişoara, 2007 [Ph. Cornel]
Le guitariste espagnol Paco de Lucía est mort ce 26 février à Cancún au Mexique. Arrêt du cœur pour l’un des plus grands musiciens de son temps. On peut dire qu’il a sorti l’art du flamenco de sa gangue traditionaliste et même de sa torpeur franquiste. C’est un raccourci mais qui, cependant, exprime bien une réalité que j’ai partagée en son temps avec des amis anti-franquistes.

Franco et sa dictature s’étaient en effet appropriés le flamenco, ainsi devenu une sorte d’art officiel figé dans ses stéréotypes. En Espagne, jusqu’à la fin des années 70, les radios, sous contrôle, saturaient leurs auditeurs de musiques « nationales » et folkloristes, en tête desquelles trônait le flamenco. Les opposants à la dictature, et les plus jeunes d’entre eux en particulier finissaient par vomir cette musique aux relents propagandistes. D’autant plus que cette Espagne de Franco, tout comme le Portugal de Salazar, s’étaient coupés du reste de l’Europe et, de ce fait, demeuraient à l’écart du jazz et du rock débarqués avec les libérateurs américains. L’irruption de Paco de Lucia dans le champ musical fut ainsi perçue comme une promesse de renouveau, y compris dans le flamenco dont il était pleinement issu et qu’il ne reniait nullement. Au contraire, il s’y affirmait comme instrumentiste de premier plan et non plus d’accompagnement, doué d’une virtuosité époustouflante au service d’un jeu des plus inventifs. Bientôt, et peu à peu, Paco de Lucia va découvrir le jazz et l’improvisation, puis se rapprocher de musiciens de jazz comme le guitariste texan Larry Coryell – un des pionniers du jazz-rock, né en 1943 – et le pianiste Chick Corea (1941), issu de l’émigration latine européenne.

En 1981, il se retrouve avec l’Anglais John McLaughlin (1942) et l’Italo-Américain Al Di Meola (1954) en un trio qui deviendra légendaire ; leur disque Friday Night in San Francisco [cliquer pour écouter] enregistré à l’issue d’une tournée mondiale s’est classé rapidement parmi les meilleures ventes de disques de guitare instrumentale. Il aura ainsi été à la fois un « revivaliste » du flamenco – notamment aux côtés de la grande figure du chant flamenco Camarón de la Isla  – et un des révélateurs du jazz-fusion.

De son vrai nom Francisco Sánchez Gomez, il était né le 21 décembre 1947 à Algesiras, province de Cadix. Paco de Lucia aura illuminé la scène musicale dans le monde entier. On le voit aussi dans le Carmen de Carlos Saura. Comme ce dernier pour le cinéma, et également Pedro Almodovar ; comme Antonio Gades pour la danse ; comme Paco Ibañez pour la chanson – pour se limiter à eux –, Paco de Lucia aura donné largement sa part au génie artistique espagnol.

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Gerard Ponthieu

Journaliste, écrivain. Retraité mais pas inactif. Blogueur depuis 2004.

Une réflexion sur “Paco de Lucia (1947-2014)

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