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Capitalisme netarchique. Plein de clics, plein de fric

Sur son blog et dans sa revue de presse dominicale, mon camarade Daniel Chaize ne manque pas de découper les meilleurs morceaux dans le lard de la bête médiatique. Exemple, extrait de Libé de samedi :

[…] Les capitalistes netarchiques (Facebook, Google, Amazon, …) fonctionnent avec 100 % des revenus pour les propriétaires et 0 % pour les utilisateurs qui cocréent la valeur de la plateforme. C’est de l’hyperexploitation ! Ce sont des modèles parasitaires : Uber n’investit pas dans le transport, ni Airbnb dans l’hôtellerie, ni Google dans les documents, ni YouTube dans la production médiatique.

Michel Bauwens, théoricien de l’économie collaborative, Libération, 21 mars 2015

C’est dit et bien dit. On n’aura moins d’excuses à cliquer comme ça, ingénument et à tour de bras, pour un oui ou un non, pour un rien. Chacun de nos clics (à part sur les blogs innocents et purs de tout commerce – et qui enrichissent au sens noble) finissent en monnaie sonnante et non trébuchante : pas la moindre hésitation quand il s’agit d’engrosser les escarcelles déjà débordantes des capitalistes netarchiques – retenons l’expression.

C’est ainsi, en effet, que les plus grosses fortunes mondiales se sont constituées à partir de petits riens, multipliés par trois fois rien, ce qui finit par faire beaucoup et même énorme ! C’est là l’application moderne d’un des fondements de l’accumulation du capital, comme disait le vieux barbu : vendre « pas cher » de façon à vendre beaucoup. Pas cher : juste au-dessus du prix que les pauvres peuvent payer, quitte à s’endetter – les banques, c’est pas pour les chiens. Et l’avantage, avec les pauvres, c’est qu’ils sont nombreux et se reproduisent en nombre !

Cette fois, ces netarchiques font encore plus fort : ils vendent du vent et en tirent des fortunes. Et, surtout, sans donner l’impression qu’ils s’empiffrent ! Ni qu’ils nous escroquent puisqu’ils « rendent service », ces braves gens, en « fluidifiant l’économie », qu’ils pompent sans vergogne – et sans même payer d’impôts dans les pays d’implantation ! –, ruinant des secteurs entiers dans lesquels les pauvres survivaient en trouvant quelque raison d’exister socialement.

Voyez les taxis, par exemple. Une technologie exploitée par des filous (Uber) a commencé à les rendre obsolètes, désuets quoi, bons à jeter. Ils avaient un métier (quoi qu’on puisse dire de certains d’entre eux, margoulins à l’ancienne), une place et une fonction sociales, participaient à l’économie générale de l’échange. N’importe qui (au chômage par exemple) peut désormais les remplacer, au pied levé, et au noir bien souvent…

1984-orwell
“1984”, film de Michael Radford d'après George Orwell

Ainsi se détruit tout un tissu, certes non parfait, mais dont la disparition sera dommageable à l’ensemble de nos sociétés.

Ainsi naissent les nouveaux empires, par glissements insensibles dans la dématérialisation des échanges et d’une grande partie de la production marchande.

Ainsi s’instaure le nouvel impérialisme, que ni Huxley ni Orwell n’avaient imaginé dans sa forme, mais qui réalise bien le contrôle mondial de l’économie sous la totalité (totalitaire), ou quasi totalité, de ses variantes. Avec, comme corollaire – à moins que ça n’en constitue les prémisses – le contrôle physique et mental des individus (déjà bien avancé !), le plus souvent avec leur consentement passif – ce qui est le fin du fin dans l’accomplissement de l’aliénation générale.

Mais où sont les laboratoires de la révolution qui s’opposera à ce désastre annoncé ? Les netarchiques seraient-ils déjà en train de s’en occuper ?…

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Gerard Ponthieu

Journaliste, écrivain. Retraité mais pas inactif. Blogueur depuis 2004.

4 réflexions sur “Capitalisme netarchique. Plein de clics, plein de fric

  • il y a les Google et les gogol ! Tandis que nous ten­tons de créer du lien, d’é­chan­ger, par­ti­ci­per, faire du « vivre ensemble » par blogs pei­nards et gra­tos, d’autres vendent à pleins tuyaux ce que d’autres ont fait. Que faire ? Ne pas tuer le petit com­merce local, le com­merce des idées qui ne coute rien, l’é­change néces­saire et vital. Faire clic pour dire, c’est autre chose que taper sur une calculette.

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  • Il y a eu un temps le labo­ra­toire d’or­go­no­mie géné­rale, qui végète aujourd’­hui après son acmé dans l’a­près-68 : preuve qu’il ne peut y avoir de labo­ra­toire sans conjonc­ture révo­lu­tion­naire ? Bon, je retourne creu­ser en bonne taupe…

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