Afrique(s)Notules & Griffures

Censure au Caire et à France Culture. L’ambassadeur impose ses frontières au géographe

La Terre n’est pas ronde et le Soleil tourne autour d’elle. Je viens d’entendre ça, ou presque, à l’écoute de la radio. Plus sérieusement : Planète Terre, l’émission scientifique de France Culture consacrée le mercredi à la géographie, s’intéressait aujourd’hui à l’Egypte. Sous le titre "Les territoires de la révolution au Caire et en Egypte", l’émission de Sylvain Kahn avait ainsi défini sa thématique aussi pertinente qu’actuelle : « La révolution égyptienne a d'ores et déjà ses lieux et ses territoires. Les villes et quartiers où vivent les révoltés comme ceux qu'ils investissent dessinent une géographie fine et différenciée de la révolution et de son "peuple". » Et parmi les invités devait se trouver, par téléphone, Marc Lavergne, géographe du CNRS et détaché au Caire depuis 2008. Eh bien non ! Pas question ! a dit l’ambassadeur de France en intimant l’ordre au chercheur de la boucler, au nom du « devoir de réserve » de tout fonctionnaire !

On croit rêver. On se dit qu’il s’agit sûrement d’une méprise, qu’on s’est mélangé les crayons avec un chercheur tunisien ou égyptien empêché de parler à Radio France – rien que de très attendu alors – par un ambassadeur de Ben Ali ou de Moubarak, que ça ne concerne pas la Phrance, pays des DDDroits de quoi ? et autres fanfaronnades verbeuses pour ministre des affaires étrangères, etc.

Qu’est-ce donc alors qu’un tel ambassadeur, sinon un  pitoyable larbin saisi de trouille devant un président et un gouvernement inconsistants face à des événements historiques ?

A peine venait-on d’éprouver le flair politique de « notre »  ambassadeur à Tunis – éjecté pour n’avoir rien vu venir – que celui-ci emboîte le pas, main sur la couture du pantalon diplomatique. Devoir de réserve contre abus de pouvoir, on aimerait connaître ses explications, sa conception de la géographie et de l'agitation géopolitique… Et savoir en passant où il se situe entre science et con-science…

Mais, dira-t-on à leur décharge, ils ont des excuses les ambassadeurs : le gouvernement qu’ils représentent n’a plus de « politique arabe ». A-t-il d’ailleurs une politique étrangère ? Ou seulement quelques intérêts exotiques plus ou moins bien compris ?

Partager

2 réflexions sur “Censure au Caire et à France Culture. L’ambassadeur impose ses frontières au géographe

  • Dominique Dréan

    Tout le pro­blème, à mon sens, est qu’un ambas­sa­deur est l’am­bas­sa­deur de France, un pays qui, récem­ment encore avait une cer­taine ligne poli­tique, bonne ou mau­vaise, mais définie.
    Cette époque est révo­lue dans la mesure où l’ac­tuel pré­sident de la République a réa­li­sé son incom­pé­tence et tourne comme une girouette folle, mais sa méga­lo­ma­nie fait que ministres ou fonc­tion­naires se consi­dèrent comme ses choses.
    Tout le monde sou­ligne aujourd’­hui sa valse hési­ta­tion sur les évé­ne­ments égyp­tiens avant de s’a­li­gner sur la posi­tion d’Obama, comme un qui­dam éga­ré dans un casi­no glis­se­rait dix euros sur le ban­co d’un roi du pétrole.
    Je suis volon­taire pour rédi­ger et por­ter une pan­carte « Sarkozy dégage » pour la pro­chaine mani­fes­ta­tion popu­laire en France.

    Répondre
  • faber

    Entre MAM et ses vacances en jet offert par le régime tuni­sien et les gre­nades anti-émeute de Fillon, on com­prend que nos gou­ver­nants n’en mènent pas large. Notre maître du monde rase les murs. Timidement il reprend la parole de l’a­mi amé­ri­cain. C’est la débâcle. L’union pour la Méditerranée fait Pschitt ! Kouchner n’au­ra même pas vécu l’a­ven­ture. Pauvre France en son petit « sarkophage ».

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


Translate »