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Le peuple inconsolable : Saint-L. a failli l’habiller

Idée de sujet philo pour le prochain bac : « Qu’est-ce de nos jours qu’un “grand homme” ? Décrivez le pied à coulisse permettant de le mesurer avec précision. Montrez en quoi la grandeur peut varier selon les situations, les lieux et les époques ».

Le futile règne sur le monde de la futilité, dont les territoires semblent en expansion infinie. Version politique : la croissance s’habille en libéral, la richesse éhontée en affichage « décomplexé ». Les gueules de pipole ont envahi nos théâtres dont les scènes merdiatiques exhibent des politiciens affairés – c’est bien le mot – à « bouger les lignes ». La décadence frappe à nos portes. Que dis-je ?, elle s’est installée chez nous, presque en nous, comme chez elle, en tenue de pute luxueuse et vulgaire.

« Le Monde » du jour aussi est en émoi, comme le monde tout court, enfin cette pusillanime partie du monde de la mondanité. Je lis donc ceci dans un papier du « quotidien de référence » : « Un style qui accompagne l’émancipation des femmes, de tout âge et de tout bord. » L’auteur voulait dire « de toutes classes », mais le mot manque à son lexique. D’autres vocables ont en revanche surgi sans craintes, dans leur pleine dévaluation d’avant les grandes soldes – ainsi ce titre : « Yves Saint Laurent salué comme un “artiste de génie” et un “libertaire” ». Notons le jeu de jambes des guillemets, ces pincettes à se boucher le nez devant les gros mots. Commodité  permettant au concert de louanges de se déverser sans honte :
– Monsieur Bergé : « Il était un vrai créateur. En ce sens, il était un libertaire, un anarchiste, il a jeté des bombes dans les jambes de la société. C’est comme cela qu’il a transformé les femmes. »
– Monsieur Sarkozy en sa pommade élyséenne et qui, en la circonstance, sait de quoi il parle : «  […] car il était convaincu que la beauté était un luxe nécessaire à tous les hommes et à toutes les femmes. »

Et Madame Dati, garde des sceaux et garde-robes de chez Dior, va-t-elle égaler l’élan de Dame Albanel, en deuil de « l’élégant complice de notre quotidien, le maître de l’art de vivre ‘Rive gauche’, symbole de luxe et de beauté dans le monde entier » ?

Et  ce ne sont que premières réactions en attendant les obsèques… Ou plutôt des funérailles nationales. Le Peuple, inconsolable, le lui doit bien.

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