Tsunami journalistique. « Paris Normandie » victime et complice d’un bidonnage via internet
Tsunami. Mardi 4 janvier, sur ce blog et sous le titre « J + 10. Les uns et les Unes », j’ai cru intéressant de reproduire les premières pages du jour d’une trentaine de quotidiens régionaux. On y chercherait en vain celle de Paris Normandie. En effet, elle ne m'avait pas semblé bien «fraîche du jour». Vous la voyez ci-contre : cette photo «plein pot» de la fameuse vague, dix jours plus tard, ça m'a paru un peu "réchauffé". J’ai cherché à vérifier sur le site du journal, mais il ne reproduit pas sa une. Dans le doute, je ne l’ai donc pas retenue.
Le déclic – il s’agit de photo ! – s’est produit aujourd’hui lorsque j’ai reçu [message personnel : merci Chantal, ma lectrice bretonne préférée] cette première photo, pour le moins impressionnante !
Vraiment impressionnante, n’est-ce pas ? Trop, non ? Regardez bien de plus près, (cliquez sur les photos pour les agrandir) cette vague si énorme, plus haute que l’immeuble de 20 étages ! Pas mal, hein ? Bien fait le trucage, non? Ouais, mais à y regarder de près on voit par exemple cet arrière-plan plus net que le premier, les éclaboussures peu réalistes, etc. Bref, c’est un faux, plutôt habile, comme internet se fait fort d’en fournir. D’où les véhémentes mises en garde du monde médiatique en direction des internautes en proie aux fausses nouvelles, car rien ne vaut un bon journal et de bons journalistes professionnels qui vérifient bien leurs infos, eux !
Hélas, le piège s’est refermé sur Paris Normandie. Voici comment, selon nos informations (qui ne proviennent pas d’internet…) : Un radio-amateur situé dans la zone du raz de marée, joint par la rédaction en quête de témoignage, propose des photos, dénichées par internet. Le quotidien de Rouen les publie dans son édition du 4 janvier, dont celle qui sert à fabriquer la une ; je souligne car c’est bien de cela qu’il s’agit : une fabrication. Le cadrage, en particulier, rehaussé par un titre (LA TRAGÉDIE) qui masque des fenêtre, en isolant la partie du tout, change le sens de l’image par un effet de loupe visuelle et dramaturgique. Procédé classique de falsification. Désir d’amplifier encore le malheur, peut-être d’en jouir : «Elle est bandante ta une, coco !»…
Le plus grave, cependant, n’est pas seulement là ; il est dans le fait que un ou des journalistes aient choisi de publier ces photos alors qu’ils avaient eux-mêmes des doutes sur leur authenticité ! C’est en effet ce qu’attestent le contenu de deux cartouches ; l’un – en rouge et en haut à gauche sur la page une – précise : «PHOTOS AMATEUR», tandis que l’autre en bas à gauche, en grisé et en caractères de légende, dit ceci : «Sur ce cliché, que nous n’avons pu formellement identifier, un véritable mur d’eau s’abat sur des habitants d’abord incrédules, puis saisis d’effroi». A l’intérieur, les autres photos sont surtitrées «Des photos d’amateur exceptionnelles»…
Ce double discours est intenable. D’un côté, nous publions, donc attestons – selon le fameux «c’est vrai, c’est dans le journal», nous nous engageons, en professionnels encartés et tout. De l’autre, faux culs comme devant, nous nous défilons en émettant des doutes sur le «véritable mur d’eau», que nous ne saurions cacher.
D’où viennent ces images ? Ce toit de pagode… Ces promeneurs endimanchés qui rigolent font plutôt penser à un groupe dans un parc d’attraction japonais. Peut-être s'agit-il d'ailleurs d'un vrai tsunami, sans conséquences catastrophiques, comme il s'en produit parfois, notamment au Japon. Mais un montage par juxtaposition de deux images, comme avec la première image ci-dessus, n'est pas à exclure. Un bon logiciel, une palette graphique et un habile coup de souris : l’enfance de l’art.
Qu’ajouter à ce naufrage journalistique ?
• Paris Normandie fait partie du groupe France Antilles de Philippe Hersant (fils de Robert), l’une des deux branches de l’«empire Hersant» dont la partie la plus grasse, la Socpress, vient d’être reprise par Dassault.
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••• En raison de ce qui précède, le jury (moi) du PPP – Palmarès de la pantoufle de presse, à l'unanimité, décide d'attribuer 3 Pantoufles d'or à Paris Normandie.
C’est pas mal mais ce sont surtout les photos qui m’inpréssione le plus , quand on voit les gens comment ils réagissent on se dit mais qu’est ce qu’ils attendent pour partirent