mon JOURNAL. Jimmy Smith emporte son Hammond au paradis du jazz
Cette fois j’y vais ! Elle piaffait dans son recoin depuis le début des temps (de blog), ma rubrique «Ça sent le jazz». Et puis, de tsunami en Auschwitz, la vague de l’actu m’a emporté. Avec elle, refoulée cette passion si lointaine et vivante, confinée en attendant à quelques disques et concerts, quelques parlotes entre intimes. Elle m'y amène pourtant aujourd'hui, l’actu, cette garce habillée de noir, qui vient de débarquer un proche. Jimmy Smith est mort ce 8 février, chez lui dans l'Arizona. Il avait 79 ans.
Je dis proche, oui, bien que ne l’ayant jamais approché «en vrai». Pas même en concert. Mais avec Bechet et Armstrong, c’est par lui que je suis né au jazz. C’était encore au temps du Teppaz – le solex des électrophones. Ado, je n’avais qu’une poignée de disques, dont trois de jazz. Dans l’ordre : un 45 tours de Sidney, avec Bechet Creole blues ; et deux 33 t.: Louis, avec St-James Infirmary, et le fameux Walk on the wild side du Jimmy. Avec quelques copains, les parents absents, on se le mettait à fond – et ça planait un max, sans shit.
À ceux pour qui ça ne joue pas : Jimmy Smith, c’est l’orgue, mais pas n’importe lequel, non, l’orgue Hammond. A l’origine, c’était l’instrument des églises états-uniennes vouées aux gospels. Il devint bientôt le type d’orgue le plus répandu dans le jazz. Le Hammond, cette chose ! Une sorte de monstre électro-mécanique avec des moteurs et des roues dentées, ses claviers et pédalier, sa grosse enceinte et son ampli. Une usine à lui tout seul, avec ses bruits de forge, ses rugissements de caverne et aussi ses envolées célestes. Jimmy Smith, c’était le Hammond incorporé, in the tripes, le swing en splendeur. Que ce soit en big band avec celui d’Oliver Nelson, ou bien en trio guitare-batterie, avec Kenny Burrel par exemple. Bref, le v’là envolé dans le cosmos.
Ici bas, il nous reste Eddy Louis et Emmanuel Bex parmi les plus connus*, en France, à encore oser cette machine increvable. Plus increvable en tout cas que son grand Jimmy de serviteur.
–––>* La relève existe avec, en vrac : Benoît Sourisse, Christian Poulet, Bruno Micheli, Valéry Tarondeau. Pas de femme, on dirait…
Parmi les grands organistes, on essaiera aussi de ne pas oublier l’excellent Billy Preston ainsi que les riffs monstrueux d’Art Neville (The Meters).