Gloire au « Bug ». Chère Cliente, Cher Client, Chers Enfoirés !
« On n’arrête pas le progrès, il s’arrête tout seul ». Ces mots cinglants d’Alexandre Vialatte, alors qu’il se trouvait pris dans un embouteillage, je ne manque pas de les ressortir à chaque fois que les occasions se présentent. Au risque de les voir s’user trop vite, tant les occasions se multiplient.
« Bug » est l’affreux mot de la modernité. Il désigne le dieu diabolique qui met des bâtons dans les roues des trains – entre autres –, les empêchent d’arriver à l’heure et, pire encore, de partir. Comme ça, aurait dit Coluche, les accidents arriveront moins vite.[ref]Mais ils arriveront quand même ! Tout ce qui peut arriver, finit par arriver ( loi de Murphy), même dans une centrale nucléaire ![/ref]
Certains nostalgiques vont ressortir leur « c’était mieux avant ». Ils auront raison, au moins concernant les trains. Et sur bien d’autres sujets de dénigrement liés à ce modernisme tragico-comique. On sait à quel point il nourrit l’inspiration des humoristes. Fernand Raynaud en fut l’un des précurseurs avec son « 22 à Asnières ». Il annonçait la course en avant vers l’absurde qui livrait l’humain à la machine, c'est-à-dire à la déshumanisation des rapports qu’on n’ose plus appeler sociaux. On en déduit que la société va mal, et même qu’elle « ne fait plus société ».
« Panne informatique », c’est le leitmotiv le plus entendu chaque fois qu’on se casse le nez sur la porte fermée d’un service public (ce qu’il en reste), devant un distributeur de timbres, de billets de banque, de cartes grises (il paraît que ça coince là aussi). Le bureau de poste urbain ressemble désormais à un magasin Darty. Les usagers sont ainsi devenus des clients – l’affreux mot pour désigner le cochon qui paie, est prié de la fermer et de paraître radieux. La Caisse d’épargne, par exemple, m’envoie du « Cher Client » pour annoncer qu’« afin de mieux [me] servir », la Direction a « le plaisir de moderniser ses services »… en fermant son agence du coin de ma rue. Tenez, je ne résiste pas à recopier leur bafouille. Attention, chef d’œuvre !
« Chère Cliente, Cher Client, « Les usages bancaires de nos clients évoluent. Mieux vous servir, c'est nous adapter à votre mode de vie en vous offrant plus d'accès à votre banque. C'est aussi vous accueillir dans les meilleures conditions. « Nos locaux situés à […] ne permettent pas une mise aux normes, aussi l'agence fermera ses portes le 4 novembre. Nous nous aurons le plaisir de vous accueillir dès le 7 novembre au sein de l'agence […] « Une agence plus accessible, plus de services avec un espace Libre Service Bancaire doté d’automates disponibles de 6h à 22h où vous pouvez / etc. »
Bon, j’arrête de m’énerver à propos de situations sur lesquelles je ne peux rien. Surtout que j’ai un train à prendre, enfin si j’arrive à acheter mon billet, ce que décideront ensemble mon ordi et ceux de la SNCF, dont celui qui ne tient qu’à un bug . Après tout, valons-nous mieux qu’un bug ? – voyez d’Ormesson…
Perso, derrière chaque « Bug, Beurk », je pense (très fort) qu’il y a, au moins, un humain (si ce n’est un groupuscule), responsable et coupable.
Complotiste ou seulement incompétent ?
Dans la même série, le cher client étant mon fils. Son compte bancaire « jeunes » est débiteur de 1,86 € depuis 2 mois. Je l’ai converti en compte ordinaire il y a 48 h, mais l’automate s’est énervé : pénalité de 8 € + 13 € pour le courrier, (je passe sur les intérêts de 8% sur 1, 86. )
Heureusement, c’est une banque locale où l’on a encore (pour combien de temps ?)affaire avec un bipède sans voix synthétique, mon « conseiller » depuis des années, lui-même estomaqué, et qui a corrigé ce qui n’est même pas un bug.
Dans la même série, je n’ai jamais put toucher les 350 € que la Région accorde comme aide à la mobilité aux apprentis (le cas de mon aîné). Pourquoi : son cadet a touché une autre subvention de livres scolaires 70 €. L’automate incapable de distinguer les deux frères répond que l’aîné a déjà touché sa subvention. Après balade de service en service, y a jamais person qui répond au téléfon. Et mes amils restent sans réponse.
Je te signale ainsi qu’à tous tes followers (ah ! ah !) la création de l’Association Française Contre l’Intelligence Artificielle, par un ingénieur et un polytechnicien si, si, rencontrés via Technologos. Excellente brochure de 38 p. de réflexion anthropologique (woui Mossieu), Ellul largement cité : http://afcia associaiton.fr/ et afcia.association@gmail.com (choix paradoxal de messagerie, personne n’est parfait).
Le comble : on dirait qu’il y a …un bug dans ton adresse afcia…(erreur 404 – il manque quelque ch après http://afcia) « Ils » se vengent !
http://afcia-association.fr/
Association Française Contre l’Intelligence Artificielle
Geai tu exagères…
Le progrès, c’est merveilleux. Quand je peux aller où je veux dans ma confortable voiture ; je peux profiter de mon poste de radio, pendant des heures dans les bouchons, je suis attendue pour un rendez vous important, mais je peux téléphoner avec mon portable. Zut ça ne passe pas. Je patiente mais mon angoisse monte, je m’énerve enfin.
Et oui c’est l’heure de pointe la ville est saturée.
Je jette un regard à la voiture collée à côté de la mienne, mon compagnon de bouchon est vert de gris. C’est tous les jours la même chose, quel stress ! mais quel progrès !
À propos de la Caisse d’Épargne, ce dont à propos : Quand tu essayes de joindre les mecs ou les nanas, tu tombes sur des robots comme un peu partout. Mais le plus drôle, puisque j’y suis, chez eux, c’est que leur système « pour nous simplifier la vie » porte un nom : la communication directe. Oh de Dieu !!!!!