Ouest-France et sa marmelade d’info-com
La com’, fille de pub et de marchandise, voilà bien l’ennemie rampante du journalisme actuel. Il est d’ailleurs bien difficile de masquer les intérêts « bien compris » d’une publication et de la com’, y compris institutionnelle. Ouest-France, premier quotidien par son tirage (800.000 exemplaires), dont le directeur se targue volontiers de morale chrétienne, vient d’être pris les doigts dans la confiture du péché de grosse gourmandise vénale.
Le journal de Rennes a publié, entre le 15 octobre et le 19 novembre, une série d’articles portant sur «La Bretagne face à ses démons», à savoir l’alcool, le tabac, le cannabis et même «la fête et ses dérives». L’appel à chasser le démon cadrait au mieux avec les anathèmes maison. Soit.
Sauf qu’il s’agissait de commandes para-publicitaires passées par la préfecture de région à Précom, la régie de Ouest-France. Sauf qu’aucune mention n’apparaissait avec ces articles, comme il est d’usage, même en tout petit, et surtout quand on veut déguiser une opération de com’. Car une com’ digne de ce nom ne saurait apparaître pour ce qu’elle est. Rien ne vaut le Canada dry du « bon » rédactionnel ! Ce en quoi madame le préfet fut des mieux servies, elle qui bataille contre les addictions et les débauches des jeunes Bretons.
Les syndicats CFDT et SNJ des journalistes ont vendu la mèche et dénoncé le micmac. Lequel devrait se répéter en mars avec des pseudo-enquêtes «politico-publicitaires». Mais ce premier avis de tempête devrait amener la direction de Ouest-France à truquer la météo. Simple question de com'.
[Source : Pierre-Henri ALLAIN, correspondant de Libération.]