EPR, Bayer-Monsanto, Alteo, Sarko… N’en jetez plus !
Il y a des jours… Des jours où le ciel s’assombrit au plus noir : relance de l’EPR franco-chinois en Grande-Bretagne ; mariage monstrueux de Bayer et de Monsanto – Monsieur Pesticide avec Madame OGM, bonjour la descendance ! Alteo et ses boues rouges en Méditerranée. Et en prime, le péril Sarko en hausse sondagière, sur les traces de Trump (il avait bien singé son ami Bush) et son négationnisme climatique…
L'affaire Alteo est loin d'être jouée ! L'usine de Gardanne est l'objet d'une mise en demeure de la préfecture des Bouches-du-Rhône, suite à un contrôle inopiné de l'Agence de l'eau. Celle-ci a en effet détecté des effluents hors normes dans les rejets actuels en mer. Un comité de suivi doit trancher ce 26 septembre.
Le sujet est claironné sur les télés et radios, sans grand discernement comme d’habitude, c'est-à-dire sans rappeler la question de fond du nucléaire, sous ses multiples aspects :
– sa dangerosité extrême, éprouvée lors de deux catastrophes majeures (Tchernobyl et Fukushima)– et plusieurs autres accidents plus ou moins minorés (Threee Miles Island aux Etats-Unis, 1979), ou dissimulés (catastrophe du complexe nucléaire Maïak, une usine de retraitement de combustible en Union soviétique, 1957, l'un des plus graves accidents nucléaires jamais connus).
– sa nocivité potentielle liée aux risques technologiques, sismiques, terroristes ; ainsi qu’à la question des déchets radioactifs sans solution acceptable ; sans oublier les risques sanitaires et écologiques liés à l’extraction de l’uranium et au traitement du combustible usagé (La Hague, entre autres) ;
– son coût exorbitant, dès lors que sont pris en compte les coûts réels d’exploitation, des incidents et accidents, de la santé des populations, des économies locales ruinées (Ukraine, Biélorussie, préfecture de Fukushima-Daïchi) , du traitement des déchets, du démantèlement si complexe des centrales en fin d’exploitation ;
– ses incertitudes technologiques spécifiques aux réacteurs EPR en construction problématique – Finlande, Flamanville et Chine –, toujours retardés, selon des budgets sans cesses réévalués.
Cocorico ! L’annonce est portée sur le ton triomphal, glorifiant l’ « excellence française » et les retombées promises avec des emplois par milliers ! Certes.
Mais les énergies renouvelables, ne devraient-elles pas créer aussi des milliers d’emplois – de la recherche à la production ? Selon des critères autrement écologiques et éthiques que ceux du nucléaire – rappelons en passant que l’extraction et le traitement initial de l’uranium (combustible fossile, limité lui aussi), sont très émetteurs de gaz à effet de serre (engins miniers gigantesques ; transport du minerai jusqu’aux usines lointaines, comme à Pierrelatte dans la Drôme.
Évidemment, la « question de l’emploi » demeure un élément déterminant ; au point de bloquer toute discussion réelle, c'est-à-dire de fond, honnête, qui évite le piège du « chantage à l’emploi ».
« L’écologie, c’est bien beau, mais ça ne donne pas du boulot ! » : paroles d’un anonyme de Gardanne interrogé par la télé sur l’affaire des boues rouges produites par l’usine Alteo[ref] L'ancienne usine Pechiney de Gardanne, créée en 1893, appartient depuis 2012 au fonds d'investissement H.I.G Capital basé à Miami. Alteo se présente comme le « premier producteur mondial d’alumines de spécialité ». Alteo Gardanne emploie 400 salariés et 250 sous-traitants[/ref]. Argument bien compréhensible, qui oppose une nécessité immédiate à une autre, différée dans le temps et autrement essentielle, cependant : celle des déséquilibres biologiques qui menacent la vie marine et, par delà, humaine.
Cette semaine aussi, sur le même registre, on a vu les syndicalistes de Fessenheim manifester pour leur emploi menacé par la fermeture annoncée de la centrale nucléaire. Des cégétistes, en l’occurrence, vont ainsi jusqu’à dénoncer « une incohérence » dans la volonté politique de vouloir maintenir l’emploi chez Alstom à Belfort tout en « détruisant » ceux de Fessenheim. Ce propos passe totalement à la trappe l’enjeu écologique lié à une centrale nucléaire ayant dépassé la limite de sa durée de vie. On compare deux situations incomparables, de même qu’on oppose ainsi une logique locale « court-termiste » à des enjeux portant sur l’avenir de l’espèce humaine. On pointe là un gouffre d’incompréhension fondamentale opposant le temps d’une vie d’homme à celui de l’espèce humaine.
Concernant précisément l’affaire des boues rouges et des effluents toxiques rejetés dans la Méditerranée, il y aurait cependant une solution technique avérée présentée depuis plusieurs mois à Alteo. Mais la « logique » financière semble s’opposer à cette solution. L’élimination totale des déchets toxiques implique en effet un coût que les actionnaires du fond d’investissement étatsunien dont dépend Alteo refusent par principe – c'est-à-dire par intérêt ! Même opposition symétrique, là encore, entre intérêts individuels immédiats et intérêts relevant du bien commun et de la conscience écologique globale.
On se trouve précisément dans l’enjeu exprimé par le « penser global - agir local », selon la formule de Jacques Ellul[ref] Professeur d'histoire du droit, sociologue, théologien protestant, 1912-1994. Penseur du système technicien, ses idées sont notamment développées en France par l’association Technologos[/ref], reprise et portée à son tour par René Dubos[ref] Agronome, biologiste, 1901-1982 Auteur de nombreux ouvrages, dont Courtisons la terre (1980) et Les Célébrations de la vie (1982)[/ref]. C’est là une dualité de tensions, que recouvrent bien nos actuels errements de Terriens mal en point. En fait, on peut affirmer sans trop s’avancer que le « penser global » de la plupart de nos contemporains se limite à l’« agir local ». Autrement dit, de la pensée de lilliputiens ne voyant guère au-delà de leur bout de nez court-termiste. Et encore ! Car il n’y parfois pas de pensée du tout, une preuve :
Un tel outrage à la beauté du monde (voir l’arrière plan : Marseille, plage des Goudes) me rend tristement pessimiste sur l’avenir de l’humanité. Ici, ce n’est pourtant qu’un forfait d’allure mineure, ordinaire – cependant à haute portée symbolique – aux côtés des agressions et des pollutions majeures : mers et océans à l’état de poubelles, agriculture chimique, élevages industriels, déforestation, désertification, surconsommation-surdéjections, atmosphère saturée par les gaz à effet de serre ; dérèglement climatique, fonte des glaces et montée des eaux… Un désastre amplement amorcé – sans même parler des folies guerrières et terroristes. Et j’en passe.
Ainsi à Gardanne, ville doublement rouge : rougie par les poussières d’alumine qui la recouvre, et rougie par quarante ans de municipalité communiste et à ce titre asservie à la croissance et à son industrie, fût-elle dévastatrice de l’environnement naturel et de la santé humaine. Il en va de même ici comme à Fessenheim et pour toute l’industrie nucléaire, soutenue depuis toujours par les communistes et la CGT, tout autant que par les socialistes et toute la classe politique et syndicaliste, à l’exception des écologistes, bien entendu, et d’EELV en particulier.
Très bon article.
Sur l’opposition protection de la nature / question de l’emploi « L’écologie, c’est bien beau, mais ça ne donne pas du boulot ! » peu de gens se rendent compte que nombre d’emplois ne créent pas de richesses réelles (ils servent avant tout à la circulation de l’argent, à avoir un salaire), voire les détruisent (le profit se fait sur la destruction de la Nature et non sur sa préservation). En fait, le « boulot » n’est et ne devrait être qu’un moyen pour vivre, auquel cas nombre de « boulots » devraient disparaître ! La question n’est pas dans l’emploi à tout prix mais dans le partage des richesses. C’est pourquoi il faut instaurer une véritable garantie inconditionnelle de revenu. Il faut payer les ouvriers et techniciens de Fessenheim pour ne pas faire fonctionner la centrale : la société entière et eux-mêmes en seraient gagnants, de même que la société, par exemple, devrait payer les buralistes pour vendre moins de tabac, pour participer à la réduction de sa consommation, avec donc une garantie sociale de leurs revenus en contrepartie. Encore une fois je ne peux que citer Robert Hainard qui écrivait :
» Le niveau de vie n’est plus la conquête du bien-être, mais il est simplement le prétexte de la course à la puissance. Il faut une société sans expansion et cette société sans expansion ne peut être qu’une société sans concurrence : c’est la clef de tout. Je crois que le moyen le plus innocent pour supprimer la concurrence ce serait de payer les gens non pour faire un travail, mais pour que le travail soit fait, c’est-à-dire que le charpentier ait pour fonction que chacun ait un toit et puis ce toit fait et entretenu, d’aller à la pêche sans se demander si le concurrent n’est pas en train de faire un deuxième toit à moitié prix. Il aurait pour fonction que chacun ait un toit et non pas de faire des toits, quitte à ficher le feu aux toits qui existent. Cette société serait basée sur le service et non sur le profit. »
Robert Hainard, Recours à la nature sauvage, Editions Utovie.
Comment enrayer cette démesure mortifère et capitaliste ?
Il y avait un excellent et terrifiant documentaire à propos du plastique hier soir sur Arte…
« Comment enrayer cette démesure mortifère et capitaliste ? » demandez vous. Toute la question est là. Il faut trouver des voies jouables, possibles, et qui rompent avec la logique capitaliste du profit. L’une d’entre elles, j’en suis persuadé, hormis toutes les avancées démocratiques véritables et nécessaires qu’il nous faudra gagner, est sur le plan économique dans l’attribution d’une garantie de revenu inconditionnelle, individuelle, pour tous. Il faut faire en sorte qu’une personne ne soit pas contrainte de vendre sa force de travail dans n’importe quel travail, même destructeur de sa santé, de sa vie, et de celle de la Planète. Autrement dit, il faut faire en sorte que des gens soient payés pour ne pas travailler dans un travail destructeur des véritables richesses contre l’obtention de la seule richesse monétaire, le salaire. Les militaires sont bien payés en temps de paix, quand il n’y a pas la guerre, et on préfère la paix, les pompiers quand il n’y a pas le feu, et l’on préfère qu’il n’y ait pas le feu, etc.
Je reprends l’exemple de mon buraliste. On pourrait supposer que la société entière, démocratiquement, décide de demander aux buralistes de participer à une vraie prévention contre les méfaits du tabac. Dans le système capitaliste actuel, les buralistes vont s’y opposer car ils vont subir une perte de revenus. Or l’argent économisé par la Sécurité Sociale, etc;, pourrait et devrait pour une part leur revenir comme garantie de revenus. L’argent qu’ils n’auraient pas par la vente de tabac, ils l’auraient sous forme de garantie de revenus en contrepartie de leurs actions anti tabac. Tout le monde serait à terme gagnant d’une telle politique. De même les travailleurs du nucléaire ne renonceront au nucléaire, à leurs emplois actuels, que s’ils sont surs d’avoir un revenu équivalent à l’actuel même en cas de fermeture des centrales.
Je suis stupéfait, depuis des années, que personne dans le monde politique et économique ne dissocie intellectuellement la richesse monétaire de la richesse réelle comme le faisait Pierre Kropotkine (1842 – 1921) dans sa Conquête du Pain par exemple ou Jacques Duboin le théoricien de l’économie distributive dans toute son oeuvre.
Je reprends un seul exemple pour illustrer mon propos. Dans le système capitaliste il faut, et c’est de plus en plus rapide, que tourne Argent-Marchandise-Argent et Marchandise-Argent-Marchandise comme l’a montré Marx dans le Livre I du Capital. Le système pour faire tourner cela au plus vite a inventé l’obsolescence programmée. Imaginons une société écologique ou voulant le devenir. On peut, avec la technologie actuelle, inventer des machines à laver le linge dont la durée de vie serait supérieure à 25 ans, et dont tous les éléments défaillants pourraient être faciles à réparer ou à remplacer par le commun des mortels, des bricoleurs. Dans le système actuel, beaucoup y perdraient : les ouvriers qui produiraient donc moins de machines et se retrouveraient au chômage, les revendeurs, les commerciaux, etc. Donc le système va faire vendre des machines dont la durée de vie sera moindre, voire la moitié, ou encore moins. Mais dans les deux cas, la richesse réelle est la même : la valeur d’usage de la machine qui lave le linge pendant 25 ans ou deux ou trois machines successives pendant le même laps de temps. Mais les conséquences sociales et écologiques ne sont pas les mêmes. Pour pouvoir passer à des machines viables, 25, 30 ans, ou plus, il faut donc garantir un revenu à ceux qui ne produiront plus autant de machines, donc qui dans la logique actuelle auront moins de salaire . Il faut une garantie de revenu pour que ces gens là puissent continuer à acheter ce qu’il leur faut d’autres pour vivre. Pour copier Robert Hainard : il faut que ces gens soient payés pour que tous aient des machines à laver et non pour les faire.
Ce n’est pas un hasard si la question d’un revenu d’existence garanti, inconditionnel, individuel, inaliénable, suffisant pour satisfaire les besoins fondamentaux, traverse maintenant les débats idéologiques dans les pays riches, et non seulement les pays riches. C’est une des voies incontournables du dépassement du capitalisme.
Entièrement d’accord ! De même qu’avec votre précédent commentaire, que celui-ci prolonge et approfondit. On touche là, sans nul doute, un aspect fondamental du système éco-politique et technicien en crise (crise finale ? = son agonie ?…) Cette idée proprement révolutionnaire de garantie de revenu universel a été étouffée aussitôt émise ou, au mieux, rangée dans le tiroir aux utopies – donc irréaliste et irréalisable ; ou irréalisable parce qu’irréaliste. Irréaliste ? Si, en effet, on renonce à transformer le réel, à agir sur lui – qu’est-ce que l’action, sinon ? Or, l” « action » politique est devenue un oxymore ; elle se réduit désormais à des considération de gestion comptable sur le modèle de l’entreprise capitaliste. Au point que la plupart des politiciens – et notamment des maires – n’ont que l’entreprise comme modèle et « idéal » politique ; aussi ne parlent-ils que le langage budgétaire. On est loin des visions de Kropotkine et de Duboin – ou même de Jaurès, sur un registre plus réformateur. Ces idées-là, oui, devraient être relancées. Mais comment les rendre audibles dans la cacophonie actuelle ? – d’autant, il est vrai, que même au début du XXe siècle, elles n’ont touché que bien peu de monde, dans les milieux anarchistes surtout. C’était le cas de mon père, qui n’avait pas lu beaucoup de livres, mais parmi ceux-là figurait « La Grande révolution qui vient » de ce Jacques Duboin que vous citez, livre que j’ai gardé de lui dans son édition de 1935, juste avant le Front populaire. Je suis d’autant plus touché de cette référence, et évidemment, de son contenu, avec des propositions aussi pertinentes sur la redistribution des richesses, sujet ô combien actuel, puisque, a contrario, c’est de nos jours l’hyper-concentration des richesses qui cause les plus gros désordres du monde : guerres innombrables et incessantes ; désastres écologiques, sanitaires, humains en général ; dérèglements climatiques et dérèglements généraux touchant toute la biosphère et en particulier l’humanité en termes sexuels, psychologiques, spirituels et religieux. Dépasser le capitalisme dans un tel contexte revient à déplacer des montagnes – ce qui nous place en plein dans le temps long, le temps géologique… Je sais : c’est mon pessimisme qui parle…
jacques Duboin est – il utopiste ou en avance sur son temps…
Sa fille Marie Louise a repris le flambeau.
Est- il temps encore de distribuer les dividendes et les richesses ?
Dans son livre « Mais où va l’argent ? elle préconise d’ajuster la masse monétaire à la réalité afin de passer d’une logique de capitalisation à une logique de répartition.….Mais quelle volonté collective pourrait transformer la monnaie pour qu’elle cesse d’être un facteur d’accumulation mais un flux qui s’écoule afin que l’économie produise des biens et non des produits financiers.
Une association de bénévoles pour une économie distributive s’est crée avec un journal « La Relève « .…
réparer cette machine infernale en se ressourçant
dans l’œuvre abondante d’économistes qui voilà un quart de siècle, oeuvraient pour une alternative contre le pire…
La chance pourrait se présenter à nouveau de refonder une vie civilisée..
Pierre Rhabi et son mouvement « Le colibri »…
Le film » Demain »
L’association crée par Marie louise Duboin Sont ce des utopies??
Mais peut être aussi des éclaireurs qui ne baissent pas les bras;;;;
Jacques Duboin était un homme génial, à n’en pas douter. Certes, le fond de son constat on peut le trouver déjà dans plus d’une page de Kropotkine et aussi dans « Le droit à la paresse » de Paul Lafargue. Duboin montre qu’il y a une « grande relève des hommes par la machine » à cause et grâce au développement incroyable de la technique. (J’ai vu hier un reportage au JT de France 2 je crois sur les « cobots », robots collaboratifs. Duboin aurait parlé de cela et pensé à partir de cette réalité.)
Une des idées de génie de Duboin (mais est-ce lui qui l’a eu en premier ?) c’est son idée de monnaie fondante. La monnaie en circulation serait gagée sur la production et serait distribuée à part égale à tous, chaque mois, en échange d’un travail utile à la société. Cette monnaie serait émise comme les billets de chemin de fer actuellement ou de métro, et disparaîtrait donc avec son utilisation. Ce qui fait qu’aucun cumul de capital ne serait possible (car au bout d’un temps déterminé cette monnaie, même encore inutilisée, ne vaudrait plus rien). Pour moi, c’est un genre d’idéal à atteindre. C’est la réconciliation de la richesse réelle avec sa mesure sociale financière.
Ceci étant dit, il faut trouver des voies vers cette « égalité économique et sociale » qui était la définition même du socialisme pour l’immense Bakounine (1814 – 1876), (Je ne connais personnellement aucune autre définition aussi juste de l’idéal socialiste du 19ème siècle, Les socialistes de nos jours n’ont de socialistes que le nom.) Pour Duboin aussi il était question de cette égalité car il était pour l’égalité de tous les salaires, de tous les revenus. (Mais combien de femmes et d’hommes, dits de « Gauche », se prétendant pour l’égalité, sont-ils vraiment pour une telle égalité réelle, à part les anarchistes et les rares partisans de Duboin, et un ami à moi qui a trouvé cette philosophie de justice tout seul ?)
Les enjeux et les futurs débats autour d’un Revenu de Base universel, individuel, inconditionnel et inaliénable, qui vont advenir dans les années futures (c’est obligé) amènent à reposer la question d’une économie distributive des richesses, bien sûr en tenant compte maintenant des limites et des exigences écologiques. La mise en place d’un tel Revenu de Base serait une avancée considérable et incontournable pour orienter la société vers le véritable idéal socialiste. Il y aurait un changement de civilisation, car pour la première fois le Revenu – la possibilité de vivre dignement – serait antérieur au travail fourni. Pour une première fois il serait admis que nous avons tous droit au partage des richesses accumulées par les générations antérieures et produites au présent. Les conséquences de la mise en place de ce Revenu seraient immenses dans de nombreux domaines.
Oui. Je vois là, cependant, quelque matière à objection. Il s’agit de la question de l’égalitarisme comme frein au « progrès ». Autrement dit au règne du « glandage » général qui serait celui du déclin. Bien sûr, on retrouve là les vieilles oppositions entre libéralisme et socialisme, entre initiative et assistanat, entre progrès, justement, et régression, etc. Et quid de l’utopie, dès lors tuée dans l’œuf et avec elle ce moteur de l’idéalisme, ou même du pragmatisme ? Quid de la créativité, du dépassement, de la belle ouvrage et des chefs d’œuvre ? Autrement dit encore, quid de l’évolution au sens de Darwin – et non pas au sens perverti du « darwinisme social » ? Et encore : quid de notre ami Nietzsche, de la volonté de puissance et du surhomme – là encore, au sens non perverti ?
Il y a là un beau sujet de réflexion autour de l’invention d’une notion d’idéal, qui ne serait pas religieux, bien que spirituel, et appellerait en effet à une élévation de la condition des humains.
Au lieu que le travail se trouve coincé entre une sacralité (dans le libéralisme comme dans le socialisme) et une souffrance imposée – et souvent les deux à la fois comme aujourd’hui – laissons ça aux robots qui s’apprêtent à débouler avec leur « intelligence artificielle » pour édifier enfin un monde d’amour et de créativité – prière de ne pas s’esclaffer ! Car, en effet, il faudrait aussi réhabiliter ces notions tant abîmées, jusqu’à leur destruction, par les valeurs morales et spécialement religieuses.
La discussion est ouverte, on ne peut plus ouverte !
PS – J’avais déjà un peu abordé le sujet ici : http://c‑pour-dire.com/feter-le-travail-cette-etrange-folie/
Merci pour vos réponses, pour ce dialogue. J’ai lu votre article dont vous donnez le lien. Très bien.
Sur la « question de l’égalitarisme comme frein au progrès, à la belle ouvrage et aux chefs-d’oeuvre », je ferai juste remarquer ce qui suit. Je pense qu’actuellement la recherche du profit immédiat, la concurrence forcenée, etc., sont les obstacles majeurs à de véritables travaux, réalisations de qualité. L’on a tous en tête je pense un nombre incroyable d’exemples de travail bâclé par des artisans du bâtiment, de diagnostics bâclés par des médecins, etc., etc. car il faut que tout aille vite, encore plus vite ! Par contre au Moyen Âge, de la belle ouvrage, des chefs-d’oeuvre ont été réalisés par des gens si peu payés : un sculpteur chevronné était payé et considéré comme un maçon, il n’y avait nullement, ou si peu, la distinction entre artiste et artisan ; Ce plus d’égalité n’a été en rien un obstacle à la création de beauté, alors que la recherche effrénée du profit enlaidit le Monde. Il y aurait tant à dire sur tout cela ! Dans un monde égalitaire, chacun serait beaucoup plus à sa place, alors que dans le système actuel les professions sont choisies (particulièrement par les classes riches) non en fonction des goûts véritables et des aptitudes mais en fonction de la situation sociale, de la considération sociale, et des revenus escomptés. A salaire égal pour tous, les gens qui feraient médecine ou pharmacie ne seraient peut-être pas du tout les mêmes qu’actuellement !
Soulager la misère est un problème, la guérir en est un autre.
L’économie distributive substitue la justice à la charité.…
Je ne peux qu’approuver cette analyse qui confirme mon pessimisme…
Et puis : http://www.arte.tv/guide/fr/067132 – 000‑A/la-supplication ( mardi 20 – 23h40 )
J’ai vu ce film. Attendons sa diffusion mardi sur Arte (à 23h 40 de surcroit…), et on en reparlera…
Aïe, je devine quelque chose de moyennement bon dans le propos…
Ta photo de la non-conscience écologique, Gé, est pour moi aussi significative de l’incivisme/courte vue de cons-sots-mateurs béats que de l’incapacité des « pouvoirs » publics à anticiper les manières compulsives des citoyens portés à consommer des marchandises dont les emballages vont largement au-delà de ce que le système peut traiter. Du micro-déchet nucléaire, en quelque sorte, mais multiplié par des millions de fois dans un grand éparpillement, ce qui en rend sa dangérosité peu perceptible.