XIII – Chronique de la peste couronnée. L’Agence régionale de santé et ses 808 fonctionnaires
[dropcap]Notre[/dropcap] fameux « système de santé » dont les Français, toujours (et encore) cocorico, n’ont pas manqué de s'enorgueillir à partir de l’après Seconde guerre, a failli s’avouer vaincu par cette troisième « guerre », virale cette fois. Et cela alors qu'il venait de subir les coups de boutoir successifs des régimes politiques ralliés à la religion du tout-libéral. Ces bienfaiteurs mettaient la dernière main à la liquidation du service public pour lequel, certes, « la santé n’a pas de prix »… mais un coût, faute de rentabilité. « Ils » – les dirigeants-affairistes, entrepreneurs de start-up et Cie – avaient jugé trop dispendieux ces hôpitaux et maternités des régions et tous leurs personnels pléthoriques – ces soignants aujourd’hui héroïsés, après des mouvements de grève de plusieurs mois. Les ARS, Agences régionales de santé, se devaient d'y mettre bon ordre ! selon leur « vocation ».
Les ARS rassemblent une escouade de « responsables » de choc – du moins par leur nombre, impressionnant. Exemple : l’agence de la région Grand-Est – la plus touchée par le virus. Cliquer d’abord sur l’image ci-dessous pour saisir d’un coup d’œil l’étendue de la bureaucratie recensée dans cette seule agence.
Puis, examiner de plus près l’organigramme, détaillé sur ses vingt-et-une pages faisant apparaître les noms, titres et affectations de quelque 808 fonctionnaires ! Vous avez bien lu : 808 ! Recomptez au besoin à partir du document entier, accessible ici :
Organigramme_DM_DT_Grand_Est_fev_2020_1 (PDF).
Précision : on dénombre 18 ARS… [ref]Tiens, une vieille connaissance, méritante et bien recyclée : Dominique Voynet, députée, ex-ministre sous Jospin, sénatrice, maire de Montreuil… puis directrice de l’ARS de Mayotte depuis janvier 2020.[/ref] Soit, arrondissons, environ 10 000 salariés… Que déduire de ce constat ? Doit-on s'en offusquer, s'indigner, dénoncer, condamner ? Le mieux serait de comprendre le fonctionnement et de pouvoir l'évaluer.
Les ARS datent de 2010 avec la loi «Hôpital, patients, santé et territoire» due à Roselyne Bachelot (la désormais Jeanne d’Arc pandémique, ancienne ministre de la Santé sous Chirac-Raffarin et Sarkozy-Fillon…). Ces organismes sont devenus peu à peu le bras armé en région des pouvoirs publics en matière de santé. Leur mission: « assurer un pilotage unifié de la santé en région, mieux répondre aux besoins de la population et accroître l’efficacité du système ». Le Covid-19 les aura pour le moins secouées quant à leur efficacité. Déjà, en juin 2018, Macron les avait désavouées en s’opposant à la fermeture de la maternité de l’hôpital de Guingamp, pourtant décidée depuis deux ans par l’ARS de Bretagne. En mars 2019, en pleine crise des gilets jaunes, trois mois après l’annonce officielle du transfert de la maternité de Creil vers Senlis faite par l’ARS, Macron a demandé au préfet de l’Oise de rouvrir le dossier de cette maternité, soulignant ainsi la distance entre l’administration et les réalités du terrain.
Depuis, d'autres (hauts) fonctionnaires de la santé se sont vu commander des rapports sur les ARS, leur devenir, leur place, et éventuellement leur changement. Il y a de quoi questionner en effet : notre système de santé est en terme de budget le premier du monde par habitant. Mais la France compte quatre fois moins de lits de réanimation que l'Allemagne ? Et sa gestion de la pandémie n'a guère été à la hauteur. Alors, ces ARS ?
XIII Les ARS… « assurer un pilotage unifié de la santé en région, mieux répondre aux besoins de la population et accroître l’efficacité du système » : Bref, on vient d’avoir l’exemple de la réussite de leur travail ! Pendant le confinement, j’ai eu l’idée d’aller y chercher des chiffres précis locaux. Rien ! Professionnellement, pendant 25 ans, j’ai été obligé de passer par ce « filtre » administratif. Perte de temps, erreurs et montagne de formulaires. Aux questions, je n’ai jamais obtenu de réponse rapide et claire de ce « machin ». Je n’avais même pas eu l’idée d’y recenser le nombre d’inutiles. Et ils sont tout autant décriés par les diverses professions de santé. 808 fonctionnaires à 2000 € brut (moyenne au pif) sécurisés à vie + avantages, ça en fait (encore) une erreur administrative confortable.
Il me vient donc une question, combien d’agences, sur d’autres sujets, existe-il en France administrative…?
Poussons même le calcul (arrondi): 800x2000x18 (agences) = 28,8M€ mensuel x 12 = 345 M€ (hors « primes », frais de fonctionnement : loyers, parc auto, téléphone, frais de « mission »…).
Désolé, Remond, calcul optimiste.
Un fonctionnaire ARS coûte au bas mot 100.000€ par an avec ses charges, son bureau son téléphone, son ordi et web à lamaison, ses frais, ses tickets-restaurant, la crèche gratos, et j’en passe…
Sans parler de l’inefficacité incontournable d’une telle usine à gaz…
Donc 800*18= 14.400 fonctionnaires à 100k€, on dépasse largement le milliard !
Et ça ne change pas le problème.
Merci pour cette information incroyable : 100 bureaucrates par département pour gérer la santé !
Relisez Ivan Illitch (Mémésis médicale), il avait raison, mais il n’aurait même pas cru à cet emballement !
Comte-Sponville lui a donné raison hier soir (grande librairie) : la vie, avant la santé !
Oui, belle émission, avec un moment en compagnie de Marcel Conche (bientôt sur « C’est pour dire »). La santé est le moyen, certes nécessaire pour atteindre le but, qui est la vie.