Carnet de voyageReportages

Athènes, carnet de voyage. 1) Tout une Histoire

DSCF4848

Athènes, 5 juin 2016. Pourquoi là ? Tout une histoire – personnelle. Et toute l’Histoire du monde – enfin cette partie qui remonte à l’Antiquité datée et à ce monde qui a serti la Méditerranée comme une perle précieuse, ce bijou appelé civilisation – bien qu’elle ne soit pas unique. Si on s’en souvient tant, après vingt-six siècles, c’est parce qu’ils avaient inventé l’alphabet – alpha, béta « Ils », ces Grecs lumineux à qui l’on doit l’irruption de la pensée pensante et donc critique, l’élévation de la conscience d’être au monde, et dans quel monde au juste ? Et naîtront ainsi le questionnement existentiel et l’amour de la sagesse, la philosophie, puis les sciences, les arts, l’histoire, la politique. Mais aussi la guerre ! Et enfin la démocratie, toujours recommencée…

athènes-2016
Trois tiers pour constituer une ville. Le quatrième pour l’immortaliser. [Ph. gp]
On s’en souvient car ils ont beaucoup écrit… Non pas qu’ils aient inventé l’écriture, elle venait des Sumériens, et peut-être même des Chinois si on remonte à la nuit des temps anciens. Mais les Perses, probablement, exportèrent cette invention fondatrice lors de leurs invasions barbares – barbare : qui parle une autre langue, ainsi que le rapporte Hérodote [ref]Auteur d’une grande œuvre historique, les Histoires, également appelée Les Enquêtes, Hérodote, est né vers 484 av. J.-C. à Halicarnasse en Grèce d’Asie mineure (Turquie actuelle), mort vers 420 av. J.-C.[/ref], le père de l’Histoire et même du journalisme.

Hérodote et Thucydide, inventeurs de l'histoire. Bustes du Musée archéologique de Naples. [d.r.]
Hérodote et Thucydide, inventeurs de l’histoire. Bustes du Musée archéologique de Naples. [d.r.]
Ses enquêtes autour de la Méditerranée délimitaient le monde connu. Il mesurait les distances en stades… (ce que perpétuent les journalistes actuels quand ils disent « grand comme trois terrains de foot ») et, au delà, en jours de marche ou de navigation à voile. Il découvrait le monde, alors si petit en apparence connue ; ce monde qu’il parcourait pour l’agrandir, ainsi qu’un Candide pré-voltairien.

Il faut aussi saluer Thucydide[ref]Homme politique et historien athénien, né vers 460 av. J.-C., mort, peut-être assassiné, entre 400 et 395. Dans sa quête de “la vérité”, il a inventé la rigueur méthodique et aussi le recoupement des sources d’information.[/ref], continuateur d’Hérodote mais en reporter de guerre, celle du Péloponnèse. Pour dire bien vite que les écrits abondent, inscrivant ainsi l’histoire grecque et ses œuvres innombrables au Patrimoine de l’Humanité. Parmi ces illustres auteurs se distingue cependant un certain Socrate qui, lui, n’écrivait pas (en tout cas il n’a pas laissé d’écrit connu) ; il en chargeait ses disciples et l’un d’eux tout particulièrement : Platon.

DSCF5089
Les fondateurs de l’Académie des arts : Socrate et son élève, Platon. À l’arrière-plan, l’Université antique. [Ph. gp]
Socrate était un parleur, un vrai beau parleur, pas un baratineur. Entouré de ses élèves, il parlait, marchait, questionnait, prétendait qu’il ne savait rien. Moyennant quoi il éleva le doute au rang de la connaissance… Mais ce premier des sceptiques et des rationalistes, questionna tout autant les dieux – jusqu’à douter de leur existence. On ne lui pardonna pas. Et il but la ciguë – jusqu’à la lie.

Je ne vais surtout pas prétendre ici raconter l’histoire de la Grèce « des origines à nos jours »… Mais plutôt tenir un carnet de voyage, sur le mode impressionniste et « dérivant », au sens où Breton puis les situs appréhendaient la ville en y déambulant comme un esquif sans voile, allant au gré des courants sensoriels. Remarquez que ces lettrés, à l’occasion un peu prétentieux sinon pompeux, n’avaient rien inventé. Montaigne, quelques siècles avant eux, avaient pratiqué la chose sans besoin de la nommer :

« Moi, qui le plus souvent voyage pour mon plaisir, ne me guide pas si mal. S’il fait laid à droite, je prends à gauche, si je me trouve mal propre à monter à cheval, je m’arrête. […] Ai-je laissé quelque chose à voir derrière moi ? j’y retourne. C’est toujours mon chemin. Je ne trace aucune ligne certaine ni droite, ni courbe. »[ref]Essais III, 9 De la vanité.[/ref]

DSCF5185
Figurine de marbre de la collection cycladienne du Musée national d’archéologie (3000 ans avant notre ère) [Ph. gp]
C’est qu’on n’invente rien ! ou si peu. Depuis des millénaires – pour ne pas remonter au Déluge et au-delà… – que l’Homme s’est mis à penser, parler, créer, agir… il s’est beaucoup répété, a beaucoup copié et recopié, voire singé, en croyant innover. Les vraies inventions sont si rares, quelque fois accidentelles et, le plus souvent, formelles. Rares, même dans les arts ! Picasso et tant d’autres n’ont-ils pas « récupéré » les créations africaines, sculptures et masques rituels notamment. Ou bien n’ont-ils pas « pompé » ces sculptures de l’époque dite cycladienne [ref]Des îles Cyclades. Objets datant d’environ 3000 ans avant notre ère.[/ref], dont peut s’enorgueillir le splendide Musée archéologique d’Athènes ? [Galerie photo ci-dessous. Cliquer sur les vignettes pour les agrandir.]

Ce musée, j’y ai passé l’après-midi complet, jusqu’à éreintement. De la Culture grand C dans la splendeur totale et dans des conditions muséologiques exceptionnelles.. Des collections préhistoriques remontant jusqu’à sept millénaires « avant » ; puis des sculptures par milliers, de marbre ou de bronze ; des céramiques et des terres-cuites ; des bijoux en or ; des vases « à en loucher » aurait dit Brassens – si on me permet cet anachronisme sacrilège…

Qu’on se rassure, je ne vais pas écrire un énième guide gréco-savant. Plutôt tenter de vous embarquer dans ma dérive athénienne (et au-delà, on verra), toute subjective, mais tout de même ancrée au sol, attestée par des photos, relativement plus « objectives » certes. Voilà pour ce premier épisode.

Partager

Gerard Ponthieu

Journaliste, écrivain. Retraité mais pas inactif. Blogueur depuis 2004.

6 réflexions sur “Athènes, carnet de voyage. 1) Tout une Histoire

  • Bravo Ponthieu. Voila qui relativise nos macronades et autres gesticulations. Aller voir les Grecs, et non pas allez se faire voir, en voila une bonne idée.

    Répondre
  • Laurence Ponthieu

    Ah, nous attendions avec impatience ce partage lumineux… Il est vrai que malgré la grosseur des tiers qui composent Athènes, un quatrième s’impose pour honorer cette matrice de notre civilisation… Merci Gérard de nous convier à ton périple tout autant dérivant qu’inspirant…

    Répondre
  • Bernadette

    La culture!!
    Nous avions même parfois oublié ce qui reste..merci de nous faire voyager avec toi à la façon de Montaigne. .
    Très beau texte ..

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


Translate »