Potion de censure

« Ils » veulent trancher ; trancher dans le vif du pouvoir pour s’en tailler une tranche ; trancher les têtes comme au bon temps de la guillotine. Héritiers de la Terreur, ils en gardent une nostalgique jouissance, tels sont nos terroristes en Chambre, Fouquier-Tinville à la manque, revanchards à la conjonction des extrêmes, se réclamant du « peuple », réduit à sa portion électorale. Assemblée nationale ? Quelle nation derrière ces agités guignolesques ?

Ainsi va notre époque, tranchant entre le Bien et le Mal, tirant leurs flèches empoisonnées de l’« arc républicain » ou de cette bien pesante bien-pensance.

Voyons tous ces censeurs. à couperets affûtés : 

Début octobre, la faculté des sciences de la Sorbonne exposait les œuvres de la singapourienne Melisa Teo. Sylvain Tesson avait écrit les textes qui devaient accompagner ces photos d’arbres et de feuillage. Ces textes ont disparu de l’exposition. Interrogée par l’artiste, la direction de l’université Jussieu assumait la censure, arguant que « leur communauté ne comprendrait pas que la faculté puisse être associée à des prises de position qui sont éloignées de ses valeurs »… [Souligné par moi, commes les autres italiques].

Peu de semaines avant, une tribune signée par 500 plumitifs récusait le choix de Sylvain Tesson comme parrain du printemps des poètes: il y était qualifié d'icône réactionnaire. Le journaliste François Krug le désignait comme une figure de « l'extrême droite littéraire »… 

Hier à la télé (3/12/24), la députée LFI, Danièle Obono, qualifiait Michel Barnier d’« imposteur ». Quand les mots perdent leur sens, la pensée se dévoie, s’annihile .

Sous un même couperet, quatre-vingts libraires « indépendants » décident de boycotter des livres « édités par les maisons du groupe Hachette, qui appartiennent maintenant à l’empire de Vincent Bolloré ». Extraits du verdict sans appel :  « En cette fin d’année, dans nos librairies indépendantes, il sera peut-être moins évident de trouver certains livres. Ils ne seront pas mis en avant, ni sur une table ni en vitrine, et peut-être même tout simplement absents. » Et la suite à l’avenant : Les signataires refusent « d’être l’outil de propagande des forces réactionnaires » mises en avant par le milliardaire breton d’extrême droite. « Il ne s’agit pas, précisent-ils, de dire que tous les auteurs et autrices qui publient chez Hachette sont d’extrême droite, mais ces livres financent et arment, souvent bien malgré eux, une entreprise qui vise à nous détruire. » Rappelons que, en juillet dernier, une campagne d’action « Désarmer l’empire Bolloré » avait déjà vu le jour, à l’appel de collectifs écologistes, décoloniaux, syndicaux, féministes et antifascistes. » 

Potion de censure, donc, dont se droguent ces incultes et infirmes de la pensée, maudissant les effets dont ils sont la cause.