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Émile-Parisien 4tet. Victoire au Moulin à Jazz de Vitrolles

Bien longtemps que je n’avais ici causé jazz. Nul manque d’envie mais la flemme qui laisse du temps à flâner… y compris au Moulin à jazz de Vitrolles, avec les potes de Charlie Free, haut-lieu provençal de la plus débridée des musiques. « Débridé », oui, tel est bien le juste mot pour évoquer le concert d’hier soir, magnifique.

Soit quatre trentenaires de mousquetaires. Au service du Roi-Jazz. En gros : D’Artagnan venu du Lot, Aramis du Gers, Porthos des Pyrénées-atlantiques, Athos du Lot-et-Garonne. Et vous aurez (bien sûr…) reconnu le quartet d’Émile Parisien, pas plus tête de veau que ses comparses, donc. Des gars du sud-ouest coalisés depuis cinq ou sept ans autour d’Émile, monté en pousse de talent depuis le collège de Marciac et sa classe de jazz ; propulsé par Jean-Louis Guilhaumon, maître d’œuvre de Jazz in Marciac. C’est là qu’il a connu le pianiste de la bande, Julien Touery (cousin en indépendance d’un McCoy Tiner). Un peu plus tard, les rejoindront Yvan Gelugne et sa grand-mère (gros son), puis Sylvain Darrifourcq aux marmites (putain, la pulsation !).

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Attention : grande musique ! Pas pour épater le méfiant, bien au contraire. Voici un jazz on ne peut plus jazz et à la fois on ne peut plus accueillant. Compos originales tissées à l’impro – pas de partoche, tout dans la tête et surtout dans le désir. Quand ils ont empoigné le sujet hier soir, dès les premières mesures « on » a su que ce serait du balaise, pas de la tartignole. Swing et tempo d’enfer, oh là cavaliers, faudra tenir sur la durée ! ­– deux bonnes heures, sacrée virée. C’était parti, en profond pays jazz, racines dans les fondamentaux, les fonts baptismaux des quartets de Coltrane et du jazz historique, Mingus dans les parages et, plus encore, appuyés sur eux et par eux propulsés, donc jetés-projetés vers la musique à venir, au delà d’Ornette C.– « the shape of jazz to come ».

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Tous quatre beaux musiciens, quarteron au sens génétique, partageux d’une musicale démocratie – modèle pour la cacophonie politique. En complète écoute réciproque, pas de coups tordus, le sourire en bouche, la joie rayonnante. Voyez l’Émile, battant des ailerons comme un jeune coq en rut, balancé d’avant-arrière, soprano en joues (deux mandarines pour soufflets), fusil du chasseur non embusqué, mèche en folie, chemise au vent (sous la cravate battant la mesure…), tirant des salves de grenailles ou bien, a capella et dans la ballade, décochant les plus douces flèches. Tandis que derrière, enfin non, sur le même plan, plein, charpenté comme un saint-mont (du Gers), ou un armagnac (pas loin), les trois lascars ne rechignent jamais à la belle ouvrage.

La centaine de veinards du Moulin ne s’y sont pas trompés hier : ovation debout, comme on dit en shakespeare. Les Victoires du Jazz aussi avaient flairé le bon cru 2009 en les sacrant Révélation instrumentale française de l’année. Une victoire sans main tricheuse.

Moulin à Jazz à Vitrolles : deux concerts par mois. Programme ici : www.charliefree.com

Photos © Gérard Tissier

 

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